mercredi 2 août 2023

Aphorismes et pensées pour Être et Devenir en amour vrai.

On pourrait commencer à ce sujet par ce propos de Mère, Mirra Alfassa qu'on trouvera ici :

https://sriaurobindouneapproche.blogspot.com/2023/08/deux-aspects-complementaires-sur-la.html

Frédérique Lemarchand - Confiance

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Se laisser-être n'est pas laisser-faire.

Se laisser-être dans le courant du fleuve de la vie n'est pas forcément laisser-faire les courants qui nous égarent de son flux principal.

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Ce n'est pas moi qui progresse, c'est le vrai et l'amour qui progressent en moi et aussi en tout à travers moi.

Ce n'est pas moi qui progresse, c'est le Divin.

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Dire Oui à ce qui est peut être cohérent avec l'évidence de dire Oui à l'exigence de transformation du Devenir. Cette cohérence est le terreau de l'amour.

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La pensée est un support de description et d'intention. Quand on cherche encore la paix de l'Être, la pensée utile est surtout descriptive. Quand on cherche la Joie du Devenir, la pensée utile est surtout intentionnelle. Mais la paix d'Être et la Joie du Devenir sont incompréhensibles pour la pensée. Vivre l'unité de l'Être et du Devenir est une connaissance autre que toute connaissance pensée.

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A celui qui ignore encore chercher l'Un de l'Être et du Devenir, l'Un de la Paix et de la Joie, il serait dommage de dire d'arrêter de chercher pour rester en Paix seulement.

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La Vie cherche un chemin d'individuation authentique dans l'individualisation héritée. 

La difficulté dans cette aventure, c'est de distinguer l'aspiration vraie de cet élan de la Vie de nos désirs d'ego. Se perpétuer contre, c'est encore être enserré dans les filets de l'individualisation dont notre ego mental est le sommet. L'élan d'individuation de la Vie est toujours créateur, y compris quand il abolit certains aspects de l'individualisation héritée. Lorsqu'il devient plus net et plus fort, il a aussi plus de douceur. Il se nourrit de calme et de tranquillité. L'individualisation est ressentie comme la matière première idéale du travail d'autocréation de la Vie. 

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Un jeu joué par le Divin amour ne consiste-il pas à s'aimer d'un seul regard à travers des visages innombrables ? L'individualisation s'observe partout dans l'évolution de l'univers et du vivant. L'individuation Divine couve en elle.

Il ne s'agirait pas d'étouffer trop vite une aspiration individuelle au nom d'un Soi impersonnel de la Vie. 

Vivre le Soi avec un cœur, c'est peut-être plus en profondeur vivre le Soi avec une âme ! 

Il y a peut-être des façons de vivre personnellement le Soi qui nous font perdre notre âme. Lucifer, le porteur de Lumière en serait une personnification.

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Aspirer au Divin amour, ce n'est pas le chercher. C'est avoir une foi inébranlable que le Divin amour viendra au premier plan. C'est vivre déjà de sa Présence en arrière-plan. C'est donc vivre la foi à partir de sa Présence.

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Une Présence du Divin amour plus ou moins présente, qu'est-ce à dire ?

Le Divin amour est une prise de conscience. Nous ne sommes qu'un avant-poste de cette prise de conscience autocréatrice.

L'inconscient de l'amour, c'est nous.

Le Devenir en ce monde est la prise de conscience du Divin amour qui se poursuit en nous.

Mais nous sommes toujours déjà l'Être de ce qui devient.

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Seules la paix et la joie créatrice de la Vie mettent en lumière sérieusement les ombres de l'individualisation dont notre ego a émergé pour en faire la matière de notre individuation authentique.

Les lumières de notre ego ne sont que des lumières de lampes de poche, même si elles permettent de comprendre qu'on est perdu dans la nuit. Mais se contenter de la paix en amont de notre individualité, d'une lumière spirituelle qui la regarderait comme une illusion à laisser se dévider jusqu'à la mort, revient peut-être à se contenter d'une nuit encore plus noire. 

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Le sens profond de la Bhagavad Gita, c'est voir dans l'effort que l'auteur de l'action n'est pas l'ego. Ce n'est pas conclure qu'il n'y a plus aucun devoir moral à prendre en compte, aucun sacrifice à offrir et aucun effort à faire parce que le libre-arbitre est illusoire.

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Se savoir doté d'une impression égoïque illusoire de choix indépendant est un savoir plus établi lorsque, empruntant la voie de l'effort au lieu de celle du moindre effort, la grâce devient un ressenti indubitable.

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L'accueil de ce qui est est immédiat au niveau de l'Être. Plus l'effort de l'ego l'amènera à coïncider à ce Oui initial, plus le cœur s'ouvrira. Plus le cœur s'éclairera en profondeur, plus le choix d'aligner sa volonté à l'ordonnancement du Devenir sera évident et libérera l'ego de lui-même pour faire place à une âme vraie, une individuation de la seule Vie [Divine de l'amour].

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Aimer absolument pour l'ego est impossible. L'ego ne peut pas se remplir d'amour, seul son cœur le peut.

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Pour l'ego, aimer être aimé, accueillir l'amour, le reconnaître jusqu'à ce qu'éclate dans le cœur la gratitude est difficile. L'ego qui se sent endetté par l'amour reçu, est tenté de dénigrer la main de celui qui le nourrit. 

Certes la main est calleuse, brusque, imprécise ou hésitante, quelle main est parfaite ? Mais les gestes de cette main imparfaite sont un don de la Vie en Devenir. 

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La gratitude vraie remercie la Vie pour tout et pour chaque personne.

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L'ego insincère, mais assez nourri, finit parfois par aller chercher une autre bonne âme dont manger la main. 

Le masque de l'éternelle victime lui sied bien.

Devant Dieu, Adam se déresponsabilise sur Eve, la femme que Dieu lui a fait, et Eve sur le serpent que Dieu a mis là au Paradis.

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Quand l'ego admet sa dette et qu'il admet qu'elle ne pourra être payée, la grâce l'amène à la gratitude, alors aimer aimer l'ensorcelle, il devient capable de compassion, de pardon,  de bienveillance et plus encore car il aime aimer passionnément. 

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Aimer aimer sincèrement, c'est admettre en l'ego l'émergence d'une qualité d'amour qui est simultanément manque et plénitude, insatisfaction et dépassement de soi-même puisque l'ego ne peut pas se remplir d'amour Divin, d'amour parfait. 

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L'amour vrai ou Divin n'est pas d'abord un désir mais une surabondance de Joie, de Félicité, qui revient vers elle-même dans une prise de conscience perpétuellement de plus en plus consciente d'elle-même.

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Tableau de Frédérique Lemarchand qui m'évoque la Main Divine qui descend nous bénir et nous infuser sa grâce transformatrice.


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Le désir-appétit, dont la pulsion vitale animale a pris forme est une force pleine, mais ce n'est pas la plénitude de l'amour Divin. Le désir-appétit convoite toujours un objet, un instrument. Cette avidité donne au désir-appétit son caractère de manque. Mais ici rien de simultané : une poussée aveugle et irréfléchie en amont précède une souffrance dramatisée en aval, et les deux semblent parfois exister indépendamment. 

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Le désir-appétit est souvent sexué et parfois sexuel. 

L'aspiration authentique de l'amour de l'amour est en son fond insexuée.

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L'amour de l'amour peut se jouer extérieurement dans nos relations sexuelles (libertins, amants, époux, etc.) et sexuées (père, mère, frère, sœur, etc.). Toutefois l'amour de l'amour se joue d'abord intérieurement dans la relation à l'amour Divin venant à travers notre cœur.

L'aspiration authentique peut se nourrir de l'énergie sexuelle : la relation sexuelle nourrit alors l'amour de l'amour et le cœur déborde d'amour.

L'aspiration peut tant et si bien se nourrir de l'énergie sexuelle qu'il n'y a plus un désir irrépressible de plaisir sexuel et de relation sexuelle : c'est ce qui rend possible la chasteté continente de ceux qui vivent comme moine.

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L'Être serait plutôt masculin, le Seigneur imperturbable, donnant sa sanction d'existence à chaque détail, et le Devenir féminin, la Mère en mouvement, attentive à chacun de ses enfants. Mais l'amour Divin est l'unité insexuée qui les précède. 

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L'amour de l'amour, l'aspiration sincère, veut être tout à la fois l'objet et l'instrument de l'amour Divin.

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Aimer aimer sincèrement, c'est aspirer à l'amour vrai, à sa perfection dans son cœur. Aspirer amoureusement à l'amour, c'est en manquer tout en en jouissant déjà pleinement.

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Aspirer à l'amour pour l'ego, c'est déjà laisser se faire transformer par l'amour. Car c'est l'effort de l'ego pour se sacrifier dans la flamme d'aspiration à la transformation. L'ego ne fait pas la flamme de son aspiration. Cette flamme est son âme vraie. L'ego peut juste s'y déposer avec ses désirs-appétits. Sans la grâce, le peut-il ? En outre, l'énergie des désirs-appétits que l'ego amène au pied de son âme de feu est un combustible nécessaire à la venue de l'amour Divin.

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L'ego qui commence à aimer aimer veut encore aimer à sa façon. Tout le monde veut de l'ordre, mais son ordre. L'ordre, c'est alors le pouvoir du mensonge. L'amour de l'ego pour lui-même et les autres devient alors une fiction mensongère. 

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Il n'y a pas d'amour Divin sans vérité. La vérité est la matrice de l'amour. 

Sans vérité, plus de distinction, plus de relation, tout ce monde de mensonges fondrait dans l'amour pur impuissant à en préserver aucun contour.

En nous, l'avant-garde de la Conscience de Vérité est la sincérité.

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L'amour de soi n'est pas l'amour de l'ego pour soi-même, l'amour-propre.

L'amour de soi est le constat du moi égoïque que cette Vie m'aime comme individu, égoïque ou non.

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L'ego qui aime aimer, se croyant encore l'auteur de l'amour, se trouve aimable en aimant. Il oublie d'aimer l'amour et que l'amour l'aime. Se trouver aimable en aimant, c'est ignorer que l'amour aime quand nous aimons.

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L'amour vrai est l'unité de la Paix et de la Joie, de l'Être et du Devenir. L'amour vrai est la substance de la prise de conscience absolue. Le Divin est l'amour vrai.

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Le Divin est l'amour. L'ego a plus ou moins d'amour qui passe vraiment à travers lui selon son effacement dans l'aspiration, sa transparence devant son cœur, son degré d'instrumentalisation au Divin, etc. 

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L'ego est un moule précieux pour l'individualité que l'amour Divin œuvre à incarner. Plus l'amour peaufine son œuvre, plus le moule est retiré. 

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Parfois il faut tout reprendre, le moule et l'individualité esquissée sont abandonnés. Même si l'âme de l'œuvre demeure, l'amour Divin devra repartir d'un nouveau matériau.

Même si le programme de l'individualisation venait à s'interrompre brusquement, qu'est-ce qui nous permet de penser que l'individuation de la Vie ne se poursuit pas ? 

Dans la Katha Upanishad, Nachiketa ne se laisse pas distraire par les propositions de Yama, la mort, qui lui promet sex, sea and Sun, luxe, calme et volupté, s'il renonce à ses vœux de connaître le secret de l'individuation du Soi en lequel s'enracine l'immortalité.

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Faisons-en notre deuil et notre espérance, le royaume Divin de l'amour signifie l'abolition de l'ego, c'est-à-dire de l'illusion, du mensonge, de l'ignorance et de toute poussée pulsionnelle aveugle.

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 Que tous nos amour soient purifiés, qu'ils brillent inconditionnellement et non préférentiellement du seul Amour Divin ! Que nos amours enfin désintéressés trouvent toute leur force passionnée douce et tranquille en affranchissant les désirs de leurs mouvements égoïstes et imparfaits. Que nos désirs d'attention soient libres des attentes de la reconnaissance ! Que nos désirs d'enrichissement soient libres de l'appropriation ! Que nos désirs d'échange d'énergie vitale deviennent une expression de la Joie du seul Amour au lieu d'un plaisir passager ! Puissent nos amours se différencier seulement selon l'intelligence du seul Amour ! Que nos personnes soient juste des masques d'où des rayons singuliers de la seule lumière brillent sur le monde et les autres ! Que les lampes trouvent les lampes avec lesquelles elles doivent briller pour inonder ce monde d'amour et de lumière !

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On trouvera d'autres aphorismes et pensées avec les liens suivants :

Aphorismes et pensées sur le flux autocréateur de la Vie


jeudi 26 août 2021

L'INTERPRETATION DE L'EVEIL DANS LA NON DUALITE MAINSTREAM PEUT LIMITER L'AVENTURE DE LA CONSCIENCE.

Quand le sans chemin s'ouvre en un chemin...



L'interprétation est souvent une pellicule de mental qui demeure dans l'œil de la vérité. Certaines interprétations s'avèrent des murs de pensées qui empêchent de voir.

La mode dans la spiritualité se référant à la non dualité est d'affirmer que personne ne s'éveille.

Douglas Harding propose des expériences pour apprendre à distinguer notre conscience personnelle, notre subjectivité, d'une part, avec, d'autre part, notre champ de perception, c'est-à-dire l'intériorité qui englobe soi et le monde.

Voici une expérience :


Dans la direction du doigt, voyez-vous quelqu'un ici au centre de vous-même ? Bien sûr là-bas sur le miroir, il y a mon visage, mais ici ?


Quand on tourne l'attention vers sa source, avec l'aide de ce doigt et de questions par exemple, nos pensées qui se promènent et font le simulacre de placer notre visage et notre identité ici, ne sont-elles pas non plus périphériques à cette ouverture ici ? Cette ouverture pointée par ce doigt n'englobe-t-elle pas soi, les autres et le monde ?

Cette ouverture non en-visagée peut prendre conscience d'elle-même. C'est comme un éveil après un rêve. C'est une vision sans tête qui s'ouvre, comme y insiste Douglas Harding.

Ainsi si on effectue cette expérience de perception avec sincérité et rigueur, on peut admettre qu'ici à zéro distance, il n'y a personne. Quand on dit qu'il n'y a personne, c'est au sens de "il n'y a aucun élément de notre personnalité permanent au fond du fond de cet ICI permanent". Une perception pure englobant tout le champ des perceptions peut donc s'éveiller à elle-même en même temps qu'on fait le constat qu'il n'y a personne ici.


Mais si on se cramponne à ce genre de formulation, est-on sincère ou aussi transparent qu'on le croit dans la lumière spirituelle ainsi découverte par une telle expérience ?

De ce point de vue, qui forme l'interprétation mainstream de l'éveil dans les spiritualités de la non dualité, s'il n'y a personne ici, nul peut être fier de son éveil et nul n'a à être humble. Si je me prends à revendiquer subjectivement l'éveil de l'intériorité comme ouverture englobante, je ne suis pas vraiment fidèle aux faits.

Toutefois, pour le plaisir et la joie de l'aventure spirituelle brisant les limitations mentales, voici une autre formulation :

Même si demeure des pailles de notre personnalité dans l'œil lumineux de Dieu, on peut être à la fois humble et fier de cette lumière par essence parfaite...

A première vue, pour un esprit perspicace qui voit à partir de l'ouverture du champ de conscience, rien n'oppose ma première formulation à cette seconde.

Cependant, imageons les conséquences pratiques de cette seconde formulation :


La phrase citée ici est inspirée d'une formulation d'Augustin d'Hippone.


Celui qui préfèrera insister aussi sur ce second type de formulation le fera, car il sera aussi un dévot.

Pour lui, la non dualité est le point de vue Divin. Lorsque ce point de vue non duel s'éveille en nous, si demeurent des éléments de caractères et de désirs personnels, un point de vue dualiste relatif demeure. La voie de la connaissance peut fort bien reconnaître ces faits. Arnaud Desjardins, le disciple de Prajnanpad, ne diraient pas le contraire, par exemple.

La sincérité ou le constat humble d'un défaut de transparence n'est peut-être pas possible pour certains ou prendra du temps.

« Moi seulement, moi et les autres, les autres et moi, les autres seulement. », disait Prajnanpad pour aider à se repérer dans l'aventure de l'éveil spirituel. Mais qu'est-ce faire attention exclusivement aux autres ? Une consécration à la philanthropie est-elle le sommet du chemin spirituel ? Un travail de guru menant l'autre vers une libération est-il le modèle de relation qui advient par l'éveil ? S'oublier soi-même au profit de l'autre dans la lumière spirituelle est certainement une ouverture du cœur, mais cela suffit-il ?

Personnellement, je suis amoureux de ce qui se cache dans les ténèbres lumineuses. Je ne nierais pas être un dévot de Cela, l'intelligence auto-créatrice de ce qui est.

Le dévot peut faire humblement avec son imperfection consciente et encore inconsciente, Cela qu'il aime est en non dualité avec elle et peut le transformer évolutivement.



J'ai symbolisé ici par du bleu entourant l'espace visible, ce qui nous permet de rencontrer ces ténèbres lumineuses autour de la conscience comme vacuité et ouverture. Mais en les rencontrant entourant la vacuité et prolongeant l'ouverture de la conscience, on voit aussi qu'elles imprègnent tout le champ de la perception.

Le mystère de l'autocréation matérielle qui est lié sans aucun doute à ces ténèbres lumineuses m'échappe. Mais parfois une lumière intuitive en sort ou une lumière qui transfigure l'apparente pauvreté de ces ténèbres en Or, en Joie.

Quant à moi, plongeant dans les ténèbres lumineuses, je n'entrevois pas là une inconscience de Cela, mais je ressens la limitation de la conscience humaine au fur et à mesure qu'elles se clarifient dans l'expérience que j'en fais.
Qu'est-ce qui me permettrait de conclure que les ténèbres sont l'essence inconsciente du Divin ? Pourquoi ne pas admettre qu'elles sont liées à mon aveuglement moi qui commence à peine à sortir de mon ignorance du Divin ? Pourquoi ne pas admettre qu'une supraconscience m'échappe, même si l'éveil de la lumière spirituelle est ici indéniable ?

Et puis, dans le cœur à la croisée du visible et de l'invisible en s'enfonçant dans un passage au sein de ces ténèbres lumineuses, le dévot s'est trouvé satellisé par une étincelle divine.



Ce n'était plus comme une personne séparée de son Dieu qui s'en rapproche, mais c'était comme un acte de conscience depuis toujours influencé par une étincelle lumineuse cachée là.



Il n'y avait plus d'ego dévotionnel, il n'y avait que la source réelle divine de mon individuation dévotionnelle elle-même.


J'aimais, mais mon amour véritable était l'amour Divin lui-même. J'étais le fils de Dieu et non plus un ego désirant Dieu.

« Le dévot de Dieu veut manger du sucre et non pas devenir du sucre », disait Ramakrishna.

L'ego avait été détrôné du centre en découvrant la lumière divine de la conscience. La pratique des expériences de Douglas Harding avait fait son œuvre. Mais l'ego était là encore en périphérie et il obstruait bien souvent le cœur. Ou il faussait l'intelligence intuitive de Cela par exemple en croyant encore faussement être l'auteur de l'action.



Souvent les tâches manuelles permettent plus facilement de réaliser que Cela seul agit.

Le « désir » de l'ego pour Cela en descendant dans le cœur et par son effort pour agir davantage comme instrument de Cela avait fini par faciliter un renversement que des forces plus ou moins inaperçues dans les ténèbres lumineuses avaient aussi préparé. 
Dans ce renversement, plus trace d'ego, il y avait juste un masque, un tourbillon satellite ramenant à un un feu de joie calme et tranquille individuel, un nœud individuel dans le tissu impersonnel de la lumière spirituelle. L'agrégat d'ego dévotionnel n'était plus qu'un masque agissant subtil pour que la réelle individualité puisse jouer ce rôle d'amoureux du Divin.

Oui, nous pouvons manger le sucre de la Joie et de l'Amour et ne pas impersonnellement devenir ce sucre. Car l'individualité réelle est une dimension de Cela...

Dès lors la fameuse distinction entre l'absolu et le relatif n'a qu'une valeur pédagogique très relative. Elle risque d'installer de la dualité où il n'y a en a pas. Donnant plus de valeur à une vie intérieure où l'absolu se réalisera, elle risque d'estimer que telles de nos actions concernent ce corps temporaire et son entretien et n'ont pas de réelles enjeux spirituels ; elle risque de laisser de côté certaines questions autour du plaisir et du désir personnels ; etc. Si la voie des œuvres est essentielle alors de tels éléments n'ont rien de relatifs. 

Le karma yoga n'est pas, dans mon expérience, qu'une méthode pour se détacher du relatif. Le Divin s'y réalise pleinement quand il œuvre à sa propre incarnation matérielle.

En outre, dans mon expérience de l'Être et du Devenir, l'éveil au Soi impersonnel ou au non Soi des ténèbres lumineuses ne s'oppose nullement à un éveil de l'individualité réelle de l'âme, des dieux et du Divin absolu.

Voici le point de vue de Ramakrishna. Tout en affirmant une spiritualité de la non dualité, il considérait l'Être suprême comme à la fois personnel et impersonnel, actif et inactif:

« Quand je pense à l'Être Suprême comme inactif - ni créer, ni préserver, ni détruire - je l'appelle Brahman ou Purusha, le Dieu Impersonnel. Quand je pense à Lui comme actif - créant, préservant et détruisant - je l'appelle Sakti ou Maya ou Prakriti, le Dieu personnel. Mais la distinction entre eux ne signifie pas une différence. Le Personnel et l'Impersonnel sont la même chose, comme le lait et sa blancheur, le diamant et son éclat, le serpent et son mouvement de frétillement. Il est impossible de concevoir l'un sans l'autre. La Mère Divine et Brahman ne font qu'un.»

Eveil dans l'éveil, voici ce qui me vient à l'esprit pour évoquer la réalisation de cette dimension individuelle de Cela. Eveil dans l'éveil aussi car il y a une éclaircie considérable dans les ténèbres lumineuses même si elles demeurent. Certes, des agrégats d'ego persistent à ne pas venir se purifier dans la lumière de l'âme ; dans les hauteurs de l'esprit et les abysses du corps, les ténèbres dominent et cachent sans doute encore d'autres lumières divines. Mais cette réalisation de l'individuation divine que nous sommes reste un pas décisif pour que le processus de l'Être et du Devenir s'éclaire davantage.

Dans mon cas, la dévotion, alliée à la voie des œuvres, révèle de plus en plus continûment dans les ténèbres lumineuses de la conscience une individualité vraie non séparée de l'essence. Il y a une différence de nature considérable avec les agrégats de personne constituant encore (malgré cette découverte) une dualité relative. L'impression qui en ressort est d'avoir en surface de soi un agrégat de bêtises et d'inexactitudes agissant alors qu'au fond de son cœur grandit un enfant de Dieu.

Mais maintenant seulement, faire la volonté de Cela devient une aventure spirituelle envisageable. Autrement dit, l'abolition de tout désir personnel et par extension de tout agrégat d'ego subsistant devient autant un choix qu'une grâce possibles.

Un processus de purification inédit peut alors débuter. Il s'agit d'intégrer et de transformer les constituants du véhicule individuel autour de la véritable individuation. Cette dynamique ne fait qu'une avec le fait de vraiment participer à l'aventure évolutive de cette autocréation divine.

Le si peu de marge de manœuvre dont disposait l'ego me paraît rétrospectivement lié à l'influence Individuante et à la grâce cosmique de Cela. Certains diront que l'ego est complétement déterminé. Mais là encore, j'ai une préférence pratique pour insister aussi sur ma première formulation, car sinon comment pratiquer vraiment la voie des œuvres et la dévotion alors que s'est éveillée la lumière spirituelle au centre de soi ?

D'ailleurs, la grâce pour moi n'est pas qu'un concept, il y a toujours eu un jeu de forces descendantes et œuvrant en mon véhicule. C'est cette descente qui a ouvert peu à peu une conscience des centres que le yoga nomme chakras et a déclenché une montée énergétique que le yoga nomme Kundalini. Sans cette révélation comment aurai-je pu aller au fond du cœur dans cette grotte de ténèbres lumineuses et y découvrir ma vraie individualité ? Et la révélation de mon individualité divine confirmait que ces forces, ces grâces agissaient aussi derrière le champ de perception, dans ce qui avait paru jusque là une inconscience des ténèbres lumineuses.

L'individualité divine dans le fond du cœur est, elle, une véritable liberté créatrice en croissance. Elle agit en chacun de nous qu'on en soit conscient ou non. Elle agit toujours en harmonie avec l'Etre et le Devenir universel. Elle est ce qui participe continûment à l'évolution créatrice de la vie. 

Voici une vieille tentative de symbolisation de cette nouvelle aventure évolutive :



A l'époque, je m'appuyai sur une tentative de discrimination du Purusha et de Prakriti pour faire grandir la capacité de mon véhicule à servir la volonté évolutive divine au lieu de simplement perpétuer le monde humain et terrestre actuels par mes pensées et mes désirs. J'avais déjà ressenti que l'âme (que je nommai "moi spirituel") était une individuation de la Prakriti et du Purusha divin universel et/ou transcendant.

Je ne percevai pas alors à quel point une purification du véhicule était en jeu pour participer pleinement à l'évolution. Une réintégration/transformation des composantes humaines autour de l'âme allait de paire avec la venue d'une nouvelle conscience éclaircissant les ténèbres lumineuses spirituellement et  matériellement. 

A suivre.

dimanche 15 août 2021

L'ÂME NE PEUT PAS ÊTRE GAGNEE PAR LE FAIBLE SELON NIRANJAN GUHA ROY

L'âme persévérante selon Niranjan Guha Roy

 "The soul cannot be won by the weak."

Very often there is an unrelenting battle between our deepest aspiration and our outer being. Sometimes it become a life and death struggle for the issue involved is serious, that is to say, if our soul wins, then there is likelihood of a most radical change in our life. But this emergence of the soul is being resisted by the established forces in the evolution. There is only one way: not to be afraid. We should throw away all the good suggestions of human wisdom, all the suggestions of the collective human consciousness and just dive with all our courage into the Divine. There are tremendously powerful universal forces which rule the humanity through the highest forms of ethics and morality and religion. They prevent us from approaching the Eternal, the One, who is all, yet beyond all. These forces too are forms of the Eternal, they are there to measure our strength, to examine the sincerity of our aspiration, to test our mind, life and body, to see if these could bear the descent of the Godhead. In a way, they temper the steel in order to forge the sword of God, the steel strings for His harp. A soul which is destined embraces difficulties for increasing his strength, wisdom and capacity. One who chooses an easy and facile path goes nowhere and comes to nothing. When the soul is conscious it automatically chooses daring, dangerous and often seemingly impossible adventures. So let us not ask for the soft path either for ourself or for others if we wish them really good. The few selected by the very nature of the inner law will have to go through the baptism of fire, will have to face the greatest ordeals and must come out victorious. If they fail, that is to say fall, they will have to rise again and again until they can pass through the formidable gates guarded by the mighty angels, entrusted with the work of choosing truly fit vessels for containing the mystic fire, the power and light of the Divine Consciousness. Sri Aurobindo repeats the words of the Upanishad. “The soul cannot be won by the weak.”


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Il y a souvent une bataille acharnée entre notre aspiration la plus profonde et notre être extérieur. Quelque fois cela devient un combat à la vie à la mort dont l'issue impliquée est sérieuse, c'est le cas de le dire, si l'âme l'emporte, alors il y a sans aucun doute u changement radical dans notre vie.

Mais cette émergence de l'âme rencontre la résistance des forces établies au cours de l'évolution.

Il ne faut jamais avoir peur sur le chemin. Il faut se débarrasser même des bonnes suggestions venues de la sagesse humaine ainsi que de toutes les suggestions collectives de l’humanité et plonger avec courage dans le Divin. De très puissantes forces universelles gouvernent l’humanité par les formes les plus élevées éthiques, morales et religieuses. Elles nous empêchent d’approcher l’Éternel , l’Un qui est tout et au delà de tout. Ces forces aussi sont des formes de l’Éternel, elles existent encore pour mesurer notre force, examiner la sincérité de notre aspiration, pour tester notre mental, vital et corps, pour voir s’ils pourront supporter la descente de la divinité. D’une certaine manière elles préparent et forgent l’épée de Dieu, les cordes d’acier pour sa harpe. Une âme qui est destinée accueille les difficultés afin d’ augmenter sa force, sagesse et capacité. Celui qui choisit un chemin facile n’ira nulle part et n’arrivera pas à grand chose. Quand l’âme est consciente elle choisit automatiquement des aventures difficiles, dangereuses et qui semblent même impossibles. Il ne faut pas demander un chemin facile pour nous ni pour les autres si nous leur voulons vraiment du bien. Les quelques êtres sélectionnés de par la nature même de la loi intérieure devront passer par le baptême du feu, devront faire face à des épreuves dont ils devront sortir victorieux. S’ils échouent ou plutôt s’ils tombent ils devront se relever encore et encore jusqu’à ce qu’ils puissent passer par les portes où les anges formidables choisissent ceux qui seront capables de contenir le feu mystique, la puissance de la lumière de la conscience divine.” L’âme ne peut pas être gagnée par les faibles” nous dit Sri Aurobindo


La souffrance spécialement la souffrance du corps est le pain quotidien qui sert de fouet pour nous faire progresser. Mais doit il en être toujours ainsi? Avec la venue de la Mère et de Sri Aurobindo sur la terre nous avons un autre aperçu, la vision d’une autre possibilité pour la vie humaine. Il existe maintenant sur terre une joie merveilleuse, puissante, un torrent, une tempête d’ananda divin. L’ expression d’une joie aussi pure et profonde que possible peut réellement soulager voire guérir la souffrance dans le mental, le vital et le corps. Si on peut lui donner une expression dynamique, elle deviendra un stimulant, une énergie intoxicante et divine qui aurait un impacte direct sur le corps et les cellules. La musique en particulier est un des meilleurs moyens pour déverser ces torrents de joie divine et la danse faite avec une attitude de révérence, beauté et aspiration peut aider le corps à contenir l’ananda divin.

Le divin veut que nous soyons toujours victorieux et la victoire sur la maladie et la souffrance est vraiment une victoire du Divin.


Niranjan Guha Roy

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Œuvre de Niranjan Guha Roy 


jeudi 22 juillet 2021

PRIÈRE POUR UN EVEIL SANS EGO-CENTRISME

Tableau de Niranjan Guha Roy


Ce n'est pas l'éveil qui apparaît et disparaît, ce sont mes tendances ego-centriques.


En d'autres mots, ce n'est pas la lumière de Dieu qui apparaît ou disparaît, c'est mon ego qui l'oublie et lui tourne le dos ou qui consent par sa grâce la plus discrète à s'y soumettre.




Et moi qui peut voir Ta lumière dès que j'y songe,
comment puis-je vivre encore une seule seconde en me détournant de Toi ?


Oui !Toi seul est mon Être, la paix et l'égalité vraie en moi.


Mais, je T'en prie, donne-moi de me fondre tout entier en mon âme, cette flamme sans fumée tout au fond de la caverne du cœur, par quoi ma volonté ne sera plus qu'une avec Ton Devenir.




2019 - JUIN 2020 - JUILLET 2021



vendredi 16 juillet 2021

EFFORTS ET NON EFFORT dans une spiritualité de l'évolution consciente de la conscience.


TANT QUE LE DESIR DEMEURE, L'EFFORT PERSONNEL EST NECESSAIRE POUR TROUVER LA JUSTE HARMONIE DE L'ÊTRE ET DU DEVENIR.

Si le point d'achèvement de la recherche spirituelle est la réalisation de la vacuité, celle-ci prendra place sans effort de notre personne. Il est là, Le Soi véritable, notre essence, sans effort, présent en tout point de la conscience.

Mais à la lumière du Soi, lui-même, tant qu'il y aura désir, rétrécissement de notre attention à un individu désirant, un effort demeurera nécessaire pour revenir à ce que nous sommes. 

La fin de la recherche spirituelle n'est pas la fin de l'aventure spirituelle. La découverte du Soi n'est pas la fin de l'évolution auto-créatrice de ce Soi.

Un effort est juste un désir personnel allant à l'encontre d'autres désirs.

En quel sens revenir au Soi auto-créateur sera alors l'objet d'un effort ? C'est toujours un désir ou une flamme d'aspiration personnels qui nous feront remonter un courant en sens contraire du désir qui ne faisait que nous extérioriser et ne plus participer pleinement à la vie créatrice. 

Mais l'effort personnel de l'amour du divin, c'est se remettre disponible à une joie sans objet au lieu de s'enchaîner à un effort pour obtenir un plaisir fugitif ou une frustration. L'effort personnel d'apprendre à aimer, à reconnaître le chemin de l'amour du divin qui s'aime à travers nous mène à la dimension créatrice de l'amour et nous libère de ses perversions consommatrices.

Pour l'ascète, la solution est de ne plus agir : l'ascète ne veut rien que le Soi éternel et ne plus rien désirer sauf le silence et l'immobilité du Soi. 

Ici, il ne s'agit pas d'éradiquer le désir et son énergie vitale. Si le Soi a produit le monde et le désir, si le Soi est le monde et s'exprime au travers du désir, nous aspirons à devenir plus conscient de notre participation à l'autocréation du soi. Nous aspirons à soumettre nos désirs à une évolution créatrice. Il ne s'agit plus d'agir seulement pour la satisfaction de cet individu que nous sommes, y compris en désirant l'ascétisme, mais il s'agit vraiment dans la liberté d'être de participer de plus en plus fluidement et intégralement à l'action du Devenir.

Si, dans l'Être, nous sommes le Soi universel et dans le Devenir, nous sommes une âme, une individuation du Soi sans mélange, qui aspire, il y aura de moins en moins d'effort personnel. Car alors c'est la force vraie et fondamentale du Devenir, l'intelligence évolutive qui agira dans sa continuité intrinsèque avec cette flamme d'aspiration de l'âme.


MEDITATION - LA PRESENCE DIVINE


Méditation – la Présence Divine


Que Ta Volonté souverainement bienveillante se réalise par la manifestation d’un monde de vérité, de paix et d’harmonie divine.
Que notre don de soi, soit total, parfait sans la moindre préférence personnelle.
Tout est éternellement le Divin Un et infiniment multiple. Chacun est Toi-même. Tu es au centre de chacun et de tous. Quelque soit le changement, la Substance constituante est toujours la même. 

Om tat sat

Tout ce qui existe sur terre, naturel ou créé par les hommes n’est que la terre sous des formes différentes. Ta Présence en chacun et tous, partout, derrière les êtres les plus obscurs, les déguisements, les déformations, les forces terrifiantes, les énergies dynamiques dans les changements perpétuels même le vide et le néant est la seule Réalité constante. Comment peux Tu manifester une telle beauté, une telle tendresse, une telle puissance dans les vases d’argile faible, fragiles et si éphémères ! Quel spectacle merveilleux, stupéfiant sans fin se déroule à chaque instant devant notre âme comme témoin, 
O Magicienne, Om Mahamaya paramarahasyamayi-amrita chaitanyamayi ananté.
Tous ces acteurs, ces actrices, chacun jouant leur rôle sur la scène qui se déroule ne sont que Toi-même innombrable.
Il y a encore des moments d’oubli et on tombe dans un abîme d’obscurité. Il y a encore une très grande quantité de friches dans la conscience, un grand travail à faire. Et c’est pourquoi je T’adresse cette prière :
Que je vois de plus en plus avec Tes yeux et Te laisse parler par ma bouche, Te laisse aimer par mon cœur.
Tu es devenue le Maître absolu, adoré de ma conscience, de mon existence.
Tu es mon paradis béatifique, l’océan de paix, de beauté, d’harmonie, de ravissement continuel.
Emporte moi dans Ton courant selon Ton gré.
Sois sans pitié quand je m’égare. Remet moi sur la voie de grâce aussitôt sans ménagement. Sois libre avec moi, je veux T’appartenir entièrement au dehors, au-dedans, à tous moments. Tu es la suprême bénédiction dans la vie de chacun et tous
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Je T’adresse cette prière

Niranjan Guha Roy

jeudi 15 juillet 2021

QUAND NOUS DÉCOUVRONS L'ÂME par Satprem

L'âme libérée de sa prison par Amita Guha Roy


La naissance psychique selon Satprem dans Sri Aurobindo ou l'aventure de la conscience.


Les premières manifestations du psychique sont la joie et l’amour. Une joie qui peut être prodigieusement intense et puissante, mais sans exaltation — tranquille, profonde comme la mer — et sans objet. La joie psychique n’a besoin de rien pour être, elle est ; même au fond d’une prison elle ne peut s’empêcher d’être, car c’est un état, non un sentiment, comme la rivière qui coule et qui est joyeuse partout où elle passe, sur la boue ou les rochers, dans les plaines ou les montagnes. Un amour qui n’est pas le contraire de la haine et qui n’a besoin de rien non plus pour être, il est ; il brûle tranquille en tout ce qu’il rencontre, tout ce qu’il voit, tout ce qu’il touche, parce qu’il ne peut s’empêcher d’aimer, c’est son état ; rien n’est bas pour lui, ni haut, ni pur, ni impur ; sa flamme ne peut être ternie ni sa joie. D’autres signes encore le révèlent : il est léger, rien ne lui pèse, comme si le monde était son jeu ; il est invulnérable, rien ne le touche, comme s’il était à jamais au-delà des tragédies, déjà sauvé de tous les accidents ; il est le mage, il voit ; il est tranquille, tranquille, comme un petit souffle au fond de l’être ; vaste comme s’il était la mer pour des millions d’années. Car il est éternel. Et il est libre, rien ne peut l’attraper ; ni la vie, ni les hommes, ni les idées, ni les doctrines, ni les pays — il est par-delà, toujours par-delà, et pourtant innombrablement au cœur de toute chose, comme s’il était un avec tout. Car Il est Dieu en nous.



Gardien du feu par Harald Datis

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