samedi 21 septembre 2019

LA RELIGIOSITÉ ANTISPIRITUELLE DE BOSSUET POINTE MALGRÉ TOUT L'ESSENTIEL !

Bossuet
Dans l’Instruction sur les états d’oraison, Bossuet ne nous instruit pas d’oraison, il instruit un procès à charge contre l'école française de spiritualité du XVIIème siècle. Il rejette dans sa globalité ce qu’il appelle la « nouvelle mystique ». Il attaque les témoignages et pratiques spirituelles des livres de Ruysbroeck et Harpius ; il estime inexacte certaines formulations de Tauler. Surtout, il cible les livres spirituels de ses contemporains, ceux de « François Malaval, un laïque sans théologie, et les deux qui sont composés par une femme, comme sont le Moyen court et facile et l’Interprétation sur le Cantique des cantiques ». Il est clair que pour Bossuet l’institution ecclésiastique et son autorité ont tout à craindre de ces laïques (et en particulier des femmes insoumises comme Mme de Guyon). Naturellement, il associe sa lutte contre les exagérations des nouveaux mystiques à la lutte contre les béguards et béguines du XIVème siècle. Homme de son époque, il est du côté de l’autorité de la tradition, qui rend légitime l’intolérance et la violence religieuse au nom d’une croyance dogmatique. Il est tout ce que la tolérance déiste du siècle à venir rejettera. 
Plus loin, dans cette Instruction à charge, il attaque le Père Combe qui veut répandre l’oraison de quiétude dans toute la société et à tous les âges comme la clef intérieure par excellence. Symptomatiquement, il fait de Bernard et d’Augustin les plus hautes références sur laquelle il fonde sa propre autorité : il s’agit de certes de deux mystiques mais leurs appels à la violence religieuse contre les hérétiques montrent que leurs lumières intérieures sont obscurcies par l’étroitesse de leur mentalité prémoderne. 
Enfin citons le passage le plus antispirituel de cette Instruction : « Par une semblable exagération, les mystiques les plus sages inculquent sans cesse leur ligature ou suspension des puissances : si on les entend à la lettre, en certains états on n’est plus uni à Dieu par l’intelligence, par la volonté, par la mémoire : mais par la substance de l’âme : chose reconnue impossible par toute la théologie, qui convient que l’on ne peut s’unir à Dieu que par la connaissance et par l’amour, par conséquent par les facultés intellectuelles ». 

Quoi de plus étonnant que cette lecture fine des mystiques pour mieux en vomir l'expérience...


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