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LUMIERE INTERIEURE CHEZ PLOTIN ET PLATON SELON PIERRE HADOT.
Pierre Hadot effectue le rapprochement entre Plotin et Platon sur ce thème du regard intérieur et extérieur dans son livre Plotin ou la simplicité du regard. Il écrit p.104-106 :
Pour Plotin, comme pour Platon, la vision consiste dans un contact de
la lumière intérieure de l’œil avec la lumière extérieure. Mais Plotin
en conclut que lorsque la vision devient spirituelle, il n’y a plus de
distinction entre la lumière intérieure et la lumière extérieure. La
vision est lumière et la lumière est vision. Il y a une sorte
d’autovision de la lumière : la lumière est comme transparente à
elle-même.
Ici-bas, certains phénomènes visuels nous permettent d’imaginer cette unité de la vision et de la lumière :
Ce n’est pas toujours la lumière extérieure et étrangère que l’œil
voit, mais, en de courts instants, il voit, avant la lumière extérieure,
une lumière qui lui est propre et qui est plus lumineuse. Ou bien elle
émane de lui la nuit dans l’obscurité, ou bien, s’il abaisse les
paupières, quand il ne désire rien voir dès autres choses, il projette
pourtant une lumière, ou bien lorsque le possesseur de l’œil le presse,
il voit la lumière qui est en lui. Alors il voit sans voir et c’est
alors surtout qu’il voit, car il voit la lumière. Les autres choses
n’étaient que lumineuses, elles n’étaient pas la lumière. ([Plotin, Ennéades,]V 5, 7, 23.)
Dans l’expérience mystique, l’œil intérieur de l’âme ne voit que lumière :
Emporté, en quelque sorte, par la vague de l’Esprit lui-même, soulevé
par ce flot qui, en quelque sorte, se gonflait, le voyant a vu
soudainement, sans voir comment il a vu, mais la vision, remplissant les
yeux de lumière, ne faisait pas voir quelque chose d’autre par cette
lumière, mais la lumière elle-même était l’objet de la vision. Car, dans
cet objet de vision, il n’y avait pas d’un côté ce que l’on voit, de
l’autre côté sa lumière, il n’y avait pas un pensant et un pensé, mais
seulement une clarté resplendissante qui a engendré ces choses dans un
moment ultérieur... Ainsi le Bien est purement lumière... ([Plotin, Ennéades,]VI 7, 36,
17.)
C’est avec cette clarté originelle que le regard l’âme vient se
confondre. C’est comme si me voyait la lumière qui est à l’intérieur
même de son propre regard :
On est bien obligé d’admettre que l’âme Le voit, lorsqu’elle est
soudainement remplie de lumière. Car cette lumière vient de Lui et est
Lui même. Et alors on est bien obligé de croire qu’Il est présent,
lorsque, comme un autre dieu que l’on appelle dans sa maison, Il vient
et nous illumine. S’Il n’était venu, Il ne nous aurait pas illuminés. Si
elle n’est pas illuminée par lui, l’âme est privée de Dieu. Mais, si elle est illuminée, elle possède ce qu'elle cherchait. Et ceci est la vraie fin pour l'âme : toucher cette lumière, voir cette lumière par cette lumière, non par la lumière d'un autre, mais par la lumière grâce à laquelle précisément elle voit. Ce que l’âme doit voir, c'est la lumière par laquelle elle est illuminée. ([Plotin, Ennéades,]V 3, 17, 28.)
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