lundi 29 février 2016

POURQUOI PARTAGER NOTRE VERITABLE NATURE AVEC LA VISION SANS TETE DE DOUGLAS HARDING ?





Il n’y peu de risque à partager une technique d’expérimentation de vision sans tête sinon à en redécouvrir la vérité lumineuse. 
Beaucoup de propositions spirituelles exigent un guru réalisé, un enseignant obligé d’affirmer la véracité de ce qu’il transmet quitte à être insincère avec ses manques flagrants de liberté parce que son enseignement exige un enseignant impeccable. Ici avec la voie de la vision sans tête seul importe le contenu de l’enseignement. Le seul prérequis de celui qui transmet le protocole est de s’y soumettre lui-même et voir ce qu’il y a à voir n’exige nullement de prétendre à une perfection humaine qu’on n’a pas.   
Avec les expérimentations de la vision sans tête, je mets directement à disposition de l’autre le moyen de voir la lumière intérieure et même si dans ma forme extérieure, je ne la rayonne pas, même si mon ego a des ombres qui l’empêchent d’être pleinement authentique et donc même si il y a en moi des manques de sincérité par rapport à cette lumière intérieure, l’autre peut, lui, la laisser se réaliser voire même plus intensément que je ne le pourrais jamais. 
Après tout mon récipient sera toujours impur et étroit puisque je ne suis qu’un homme mais la place qui reste dans ce récipient est remplie de cette lumière et c’est là toute ma joie de pouvoir le redécouvrir à l’instant. Inutile de ne boire à longueur de temps que mes impuretés dans l’amertume ; ce breuvage de lumière a des vertus purifiantes dont je ne connais même pas tous les chemins quand il plonge dans mon inconscient le plus matériel. 

Mon ami, on peut ainsi partager ce breuvage de lumière sans l’ombre d’un doute quant à son obscurcissement par nos défauts et même si nous manquons encore de bienveillance et surtout encore de sincérité envers nous-mêmes. Les expérimentations proposées n’ont rien de personnelles. L’expérimentation qui peut s’accomplir en toi si elle a à s’accomplir le fera d’elle-même…  

Moi-même je me souviens que la première expérimentation à s’accomplir a eu lieu devant cette page-ci (p.150-151, La troisième voie) de Douglas Harding :
 
En cliquant sur l'image on aura une meilleure idée du dessin voire du texte.
Soudain lisant ce livre là-bas, me mettant à l’écoute de ce qui était dit là-bas sur ce livre, je suis devenu meilleur lecteur de moi-même, réalisant la plénitude de ce qui me manquait à zéro distance… 

Encore le même dessin.


Le doigt sur le dessin ne pointait pas seulement quelque chose d’imaginé mentalement au-dessus du bonhomme dessiné mais il pointe encore à l’instant au-dessus de mes épaules la véritable nature de lecteur, seul et unique que je suis (comme chacun d'ailleurs peut le constater pour lui aussi).

L’enseignant spirituel, auteur du livre avait su s’effacer au point où ce qui était dit était mon propre raisonnement me parlant de moi-même, de cette parfaite lumière ouverte que (par notre nature commune) je suis avant tout.

Cet enseignant est l’un des rares dans la spiritualité à proposer une expérimentation proprement scientifique. Comme un scientifique dont le nom est parfois associé à une formule, son individualité et donc sa qualité humaine n’avait rien à voir avec sa formule.

Et dans cette lumière pointée d’une façon qui n’exige pas la mortification des défauts ou la disparation de toute trace d’ego et d’émotion, je peux commencer enfin à être sincère : l’amour et la bienveillance ne sont pas le fait de ma petite personne.

mercredi 24 février 2016

LE BONHEUR EST-IL INDECENT FACE A L'HORREUR DU MONDE ? PAIX, JOIE ET BEATITUDE DANS L'AMOUR CREATEUR.


"Je Suis" est la paix. Le soleil brille dans le ciel bleu ou derrière les nuages. 

Le non dualiste radical parlera en tant que ce "je suis". Il affirmera sa paix radicale et irréversible : pour lui tant que la paix n'est pas réalisée, le "Je suis", le Soi véritable n'est pas réalisé. 


Positionnons-nous comme un ego qui apprend à laisser la place au centre au "Je suis". Cet ego n'est pas encore tout à fait en paix mais il sait bientôt que son manque de paix est toujours relié au fait de ne pas se laisser illuminer par la paix qui demeure éternellement au centre de l'esprit. Il sait que la lumière intérieure est une paix éternelle présente en tout et au-delà au-delà de tout.

La paix au centre n'empêche ni la bonne humeur ni la tristesse. Mais elle évite la noyade de l'ego : je ne suis pas noyé dans la tristesse, il y a tristesse et il y a paix ; je ne suis pas noyé dans ma bonne humeur, il y a bonne humeur et il y a paix.

Et si cet ego qui sait retrouver en soi la paix essentielle se met à véritablement l'aimer et à la partager explicitement ou implicitement alors émerge peu à peu une "certaine" joie sans objet, une énergie intérieure qui fait vibrer la vitalité au-delà de la vitalité proprement physique. La paix peut apparaître comme un choix mais la joie sans objet est une grâce. La joie en question est un feu intérieur avec des allumages plus ou moins foudroyants qui suit des chenaux dans le corps se prolongeant ciel et terre.


On remarquera que ce schéma n'indique pas que l'amour inconditionnel nie pitié, peur et séparation : il les accueille.

Dans l'accueil inconditionnel de ce qui est manifesté et de ce qui se manifeste est en jeu un amour sans préférence et sans condition de Cela qui donne à être : non plus ma petite volonté personnelle mais la volonté de "Je Suis". Mon amour pour Cela prend le risque de la soumission à une providence : chaque situation est l'occasion d'agir pour Lui et par Lui. L'amour ainsi purifié est une intelligence intuitive en croissance. Une intelligence du cœur dit la tradition occidentale. Mais "dire Oui à ce qui est ici et maintenant" n'est-ce se faire le complice du pire ?


Premièrement, un pompier qui s'affolerait face à un cadavre ou à du sang ne peut pas porter secours, il doit au moins demeurer flegmatique malgré ses émotions. La paix intérieure donne au flegme une puissance de plus en plus forte. Sans flegme pas d'amour intelligent !

Deuxièmement, l'amour pur s'expérimente vraiment dans la paix du cœur car la paix est un fondement nécessaire à l'accueil de l'autre. Accueillir le pire consiste aussi et d'abord à accueillir la détresse humaine qui en ressort. Ma forteresse et mon refuge intérieur n'ont peut-être pas ébranlé mon sentiment de paix mais celui-ci ne me rend pas étranger à la détresse humaine. Émerge alors une nouvelle dimension caractéristique de la révélation croissante de l'amour pur : il y a la tristesse ou l'angoisse de l'autre qui soudain paraît nue sans filtre. Ce n'est plus moi qui imagine mais la tristesse ou l'angoisse de l'autre est ressentie. C'est un préalable pour que l'amour pur dans la paix rende l'ego plus intelligent, plus intuitif dans ses actes pour porter secours à l'autre.

Ainsi il y a une paix et une joie (car l'énergie intérieure est joie) de l'amour transpersonnel qui n'empêchent nullement de partager la tristesse, les rires mais aussi l'angoisse de mort, le deuil sans que cette paix éternelle et cette joie de l'amour pur en devenir ne vacillent pour faire de l'ego un instrument accordé qui sonne juste. 

Par exemple, il y a des deuils qui cachent de l'égocentrisme malheureux : il y a des gens endeuillés par la mort d'un enfant qui négligent leurs proches encore vivants ; il y a des gens endeuillés qui prétendent que nul ne peut être à leur place négligeant souvent le fait que celui qui leur parle a connu plus de deuils qu'eux... Même quelqu'un atteint d'un handicap, d'une maladie mortelle et cause de douleurs ou encore blessé psychiquement à une profondeur qui fragilise tout abandon à la lumière intérieure n'est pas tout à fait exempt de la question d'être égocentrique ou non dans sa douleur et sa souffrance. 

Il y a une négativité tournée vers soi qui nous laisse au centre et nous empêche de voir notre vulnérabilité blessée et de l'accueillir dans la paix intérieure. Il y a une négativité tournée vers l'autre, tel(s) autre(s) et tous les autres qui nous empêchent d'accueillir la tristesse précise liée à une trahison qui nous hante et repousse le deuil à faire. La négativité qui peut d'ailleurs œuvrer alternativement ou conjointement contre soi et l'autre est toujours un art de dramatiser une émotion dramatique insupportable. Souvent c'est la douceur ferme d'un autre qui sera le porte voix de la lumière intérieure pour ne pas demeurer dans l'agitation de la négativité.

L'ego refuse souvent sans même le voir de laisser faire le deuil ou/et il se complait secrètement dans sa souffrance car l'ego égocentrique vit de l'amour du drame. L'ego pour servir son âme doit tout mettre de son drame au pied de la lumière intérieure et cette paix qui en émane consumera le drame. 
L'ego se saura enfin aimé, son égocentrisme mourra d'amour. 
L'ego amoureux de son drame se veut au centre et dénie à tout autre de pouvoir le comprendre. L'ego s’illusionnant incompris refuse de s'abandonner à la lumière intérieure qui seule guérit les blessures de l'âme. Même un ego qui connaît le geste pour se voir dans la lumière intérieure peut entretenir une ombre subtile qui l'amène à demeurer ancré dans le drame. L'ego n'est plus diabolique (séparé) mais luciférien (porteur de lumière et donc de demie-vérité). Se réaliser dans la lumière intérieure demande un je-ne-sais-quoi pour ne pas glisser dans le luciférien. Nous avons souvent besoin d'amis spirituels capables de psychologie et nous devons apprendre à écouter la voix de Cela à travers eux avant de l'entendre de plus en plus en toute chose.

Face à des expériences lucifériennes de ce type emprisonnant l'autre ou m'emprisonnant moi-même, je me suis aperçu qu'il y a des pessimismes qui sont de la désespérance vis à vis d'une perfection qui demande à s'incarner à travers nous dans et par la paix intérieure et la joie de l'amour. Le cynisme contemporain vient souvent de là : nous n'avons qu'à nous soumettre à ce monde et à en tirer le meilleur profit puisque toutes les utopies ont fini en dystopies. Un autre archétype de cette désespérance dont la présence est sensible dans les milieux spirituels me paraît être la pensée de Schopenhauer. Sa compassion et sa paix échouent sur sa désespérance et l'amène à manquer d'un sens élémentaire de la justice.



Arbre de Gabriel Durand 2016

Comment alors s'allient la soif et la faim de la justice avec la paix intérieure ? 


Car c'est bien là que le "Oui de la non dualité à ce qui est ici et maintenant" se faisant complice du pire paraît peu acceptable. Le philosophe historien de sa discipline aura en tête une réinterprétation agnostique et "païenne" du laisser-être du chrétien Maître Eckhart par Martin Heidegger qui n'a jamais su mettre en cause vraiment sa participation au régime nazi et donc à ses crimes. Le spiritualiste pensera aussi à Karlfried Graf Dürkheim ou à Mircea Eliade qui ont eu aussi des compromissions avec des politiques criminelles. Du point de vue d'une soif de justice, il ré-envisagera d'un autre œil ces gurus indiens qui n'interrogèrent jamais le système des castes hindou. Aujourd'hui chez les spiritualistes intéressés aux sagesses de l'orient, on voit souvent des plaidoyers remarquables pour les animaux accompagnés de promotion du végétarisme et du véganisme mais moins souvent des actions et des prises de position pour limiter la marchandisation des choses, de l'espace et du temps. Car pour eux, fidèles à tous les corps ecclésiastiques (au sens de religieux professionnel) du passé et du présent, le temps de l'enseignement spirituel est encore un moyen de gagner sa vie, d'arrondir ses fins de mois voire de réussir financièrement.

On peut constater son imperfection et rester en la paix de "Je suis". La contrition, c'est-à-dire le remords inquiet n'est pas nécessaire. L'attrition suffit. J'ai raté quelque chose de l'essentiel mais je suis là pour apprendre et même si je rechute, je me tenir devant lui en paix dans la connaissance de plus en plus saillante de mes imperfections.

Une image pour mieux approcher le rapport entre paix, joie, amour et justice serait que le tableau est toujours parfait dans sa globalité même si l'horreur d'un détail s'avère indéniable. Par exemple le tyrannosaure est un moment de la perfection du tableau mais dans le détail, c'est un carnivore qui peut manger ses propres petits et qui n'a aucune idée de ce qui se trame dans le ciel qu'il ne contemple jamais... C'est de notre niveau de perfection actuelle que nous pouvons voir ceci (les détenus de nos prisons n'y voient eux qu'une analogie avec la loi de la jungle qu'ils connaissent, d'où le succès des documentaires animaliers auprès d'eux(le rouge dans la spirale dynamique)). La beauté de l'univers ne peut jamais disparaître malgré l'horreur de certains de ses détails. Mais l'horreur face à un détail de l'histoire peut éveiller un nouvel élan vers un niveau de perfection plus intense, plus profond, plus à l'image de l'infinie perfection intérieure qui se révèle alors.

La faim et la soif de la justice ont beaucoup à voir avec l'amour de la beauté. Le spectateur artiste sent que telle œuvre est plus forte que telle autre dans cette équation d'harmonie immanente, de lien à la transcendance et d'individualisation stylistique. L'assoiffé et l'affamé de justice sait que la justice met en jeu le lien à la transcendance du Soi (non Soi), une harmonie sociale et les conditions sociales permettant à chacun de développer son individualité.

Il faut dire oui au dinosaure pour que se manifeste dans l'image même le nouveau niveau de perfection nécessaire. Aujourd'hui il faut faire face paisiblement aux réalités mettant en jeu l'imperfection humaine pour commencer à apercevoir simultanément ce qui en soi-même lui donne corps. Car au fond le "charmant" diplodocus herbivore fait partie de l'écosystème qui comprend le tyrannosaure. Voir en paix le réel n'est pas l'aimer. Le comprendre et l'expliquer n'est pas pas souscrire à sa prolongation telle quelle. Mais il s'agit de plonger dans la conscience la plus parfaite possible du réel. D'ailleurs je ne suis jamais individuellement détaché du réel : je participe forcément d'une manière ou d'une autre à l'impasse du réel humain.  Voir authentiquement l'imperfection du monde et donc sa laideur revient à voir la mienne mais aussi déjà aspirer à une nouvelle forme de beauté.


Aimer purement et radicalement est participer de plus en plus consciemment à plonger le sur-réel dans le réel (de notre individualité y compris). Tout moment de perfectionnement devient à sont tour usagé, insatisfaisant et rétif à son évolution. Tout moment de perfectionnement porte inéluctablement en lui ce qui deviendra l'impasse de demain. L'amour pur et radical est donc embellissement perpétuel, il ne peut être étranger au ravissement de la beauté et donc à la béatitude.
 
La Joie selon Amita et Niranjan Guha Roy

Heureux ceux qui ont faim et soif de justice car ils seront rassasiés !

samedi 13 février 2016

PENSEE INTEGRALE ET SPIRITUALITE INTEGRALE.



Former le mental est nécessaire : il ne doit ni se cantonner à être prémoderne, moderne ou postmoderne... Le mental postmoderne aime beaucoup vouloir se reconnaître dans les mouvements minoritaires même si la minorité ne garantit nullement l'authenticité... Mais il a raison quand il aboutit au scepticisme authentique qui voit dans toute expression mentale même une synthèse ouverte type pensée intégrale d'un Ken Wilber le risque d'une forteresse mentale de plus. Par crainte du relativisme postmoderne, on risque de vouloir nier l'utilité d'une mentalité postmoderne pour parachever la décrispation identitaire du moderne. Il y a un pseudo-universalisme moderne qui empêche tout métissage culturel. Or sans ce métissage culturel rien ne permet un réel dépassement de l'identitaire prémoderne tout en ouvrant à de nouvelles composantes universalistes d'émerger. Sans ce postmodernisme, il n'y a pas d'ouverture au spirituel. Le relativisme au sens fort n'est pas forcément l'affirmation que tout se vaut mais que tout est relatif à une instance autre qu'une révélation religieuse (prémodernité), qu'une vision philosophique rationnelle (modernité). L'essence positive du postmodernisme est à comprendre au sens où "tout doit être relatif à un véritable dialogue interculturel" dont on ne peut présupposer que les conditions pour qu'il soit effectif. Le dialogue et la convivialité postmoderne ne sont guère incarnés institutionnellement. Certains gauchistes s'y sont essayés mais pour devenir vraiment moteur, ce mouvement ne doit pas permettre un prosélytisme religieux ou culturel mais une véritable éthique de la discussion où la conviction d'être ensemble et l'échange des arguments restent premiers. 


D'où du point de vue post-postmoderne, la conception d'un espace laïque en partie neutre vis-à-vis des options métaphysiques et religieuses mais aussi la promotion encore à faire d'un espace laïque porteur d'un idéal "spirituel" non neutre d'universalisation et de dépassement des particularismes  dans la constitution d'une fraternité républicaine. 

Quant à l'hypermoderne qui entend dépasser le postmodernisme dans une pensée systémique, il bute encore souvent sur la non intégration des limites inhérentes au mental.


La pensée systémique ouverte est entrée récemment dans l'histoire. Spinoza et Hegel sont certainement les deux premiers penseurs à envisager l'univers et le monde humain dans une puissante saisie mentale interdisciplinaire ainsi que dans une certaine lumière intérieure.
Mais ce sont aussi peut-être parmi les derniers penseurs à posséder la connaissance intégrale des connaissances de leur époque. On a pu dénoncer justement leur système de pensée comme totalité close.
On peut avoir une forte connaissance interdisciplinaire mais on est donc devenu incapable de tout embrasser. On sait que le mental risque des égarements totalitaires à vouloir concevoir la totalité. Marx est l'auteur de l'une des pensées intégrales les plus conséquentes mais aussi l'inspirateur direct des pires totalitarismes du 20ème siècle. Des pans de sa pensée sont pertinents mais son idée d'une dictature du prolétariat pour accélérer l'histoire est en soi contraire à la souveraineté d'un peuple où chaque citoyen peut s'exprimer librement.

Aujourd'hui cette connaissance mentale encyclopédique est donc non seulement devenue impossible mais en outre risque d'ignorer l'ouverture du mental à des lumières supérieures. Toute pensée intégrale ne peut donc que se déployer dans l'ouverture à son impensé et à une dimension non mentale.

Dans ce monde de fractionnement des connaissances, nous avons des experts. Ce qui n'est pas loin de croiser l'esprit d'un pouvoir accordé à ceux qui savent comme dans le cas de la dictature du prolétariat. Mais l'expertise des experts s'avère toujours limitée et ignore les objections de bon sens d'un simple citoyen ou d'un bon connaisseur de leurs connaissances limitrophes. Il faut que le non savoir mental ou les risques inhérent à une décision reposant sur un savoir parcellaire puisse être intégrés dans une sage décision politique.

Il semble donc urgent d'atteindre une intelligence collective capable de créer des interconnexions entre les savoirs mais aussi capable d'intégrer davantage le sens des objections et des propositions démocratiques. Il y a ici un enjeu évolutif de l'humanité. Cette intelligence collective irait au-delà de la simple intelligence systémique.

Des méthodes nouvelles de communication renforcent l'intelligence collective et elles impliquent une démocratisation plus forte des décisions. Cette évolution culturelle est devenue une nécessité pour éviter les désordres moraux, psychologiques, sociaux, écologiques, etc.

Toutefois cet effort vers une intelligence collective face à cette crise évolutive dont les désordres cités sont les symptômes met en jeu deux directions. 

Première direction : la justesse de l'expression qui permet l'individualisation de la créativité de chacun et la prise en compte de l'autre point de vue. Toute vision systémique doit donc rester ouverte au point de vue de l'autre et à d'autres visions systémiques alternatives. Cette première direction met en jeu une évolution des mentalités et la reconnaissance d'une spirale dynamique des mentalités intégrée consciemment au cœur de nos systèmes éducatifs et décisionnels. Reconnaître l'inégal développement mental n'implique pas de nier l'égale dignité des personnes et surtout n'implique pas de nier les objections tenues par des personnes d'apparent moindre développement mental à commencer par nos enfants.

Deuxième direction : il y a la justesse de l'ouverture intérieur où soi et l'autre sommes l'expression d'un seul et unique champ de conscience. A partir de cette réalisation, les limites de la conscience mentale même expansée dans une intelligence collective sont vues mais paradoxalement, dans cet unique champ de conscience, même si le fractionnement mental est reconnu indépassable, une communion des personnes ne paraît plus une utopie.
Toute expression mentale est plus ou moins informée, cultivée ou authentique mais cela reste ultimement une pure fiction car ce n'est pas une perception directe du réel et sa matérialisation est plus ou moins problématique. Une matérialisation d'une idée mentale comme une technologie fait appel à des médiations de plus en plus complexes à la hauteur même de ses performances.  Ainsi plus une technologie est ambitieuse plus elle fait appel à des processus qui s'occultent aux yeux de ceux qui l'utilisent et dès lors usure, panne, accident et même catastrophe ne sont plus improbables.

La fiction peut pointer une perception mais seul ce qui perçoit en dehors du mental sait dès lors proprement distinguer la fiction de la perception. L'unique champ de conscience se ressent directement dans la lumière de soi-même au cœur d'un individu où s'est dépassée la seule vie de conscience mentale.

La lumière intérieure est ici quand j'en parle une fiction, m'intéresse sa perception de plus en plus fine non pas seulement dans la précision de son expression mentale mais sa transparence à elle-même. Quand je lis certains auteurs, je me lis parfois dans l'expression de ma perception mais plus grande encore sera la joie quand cette expression permet de mieux percevoir ce qu'est la perception de la lumière intérieure elle-même.  Comme si les ténèbres lumineuses se dévoilaient à l'intérieur d'elles-mêmes dans une transparence plus grande.

J'en viens donc à une expérience spirituelle intégrale en ce qu'elle vise à affiner cette lumière intérieure à partir d'elle-même. Autrement dit, tout ce qui est spirituellement expérimentable m'intéresse et me semble susceptible de s'intégrer dans une évolution intérieure. Ceci dit plus l'évolution intérieure a lieu, plus cela s'impose providentiellement. Cette densité du providentiel ne fait que croître si l'on se consacre à cette aventure... Ce n'est plus seulement l'aventure d'un individu dans la lumière intérieure mais c'est aussi et d'abord l'aventure de cette lumière s'individualisant dans sa manifestation évolutive de l'univers et du vivant.