jeudi 26 avril 2012

QUAND LA SPIRITUALITE DIT SON MOT A LA RELIGION.


« Personne n’a le droit de s’imposer aux autres et contre leur volonté comme un guide religieux ou spirituel. Vous n’avez aucun droit de dicter à X et Y leur vie intérieure ou extérieure. Encore une fois, la confusion et l’incohérence de votre état d’esprit actuel vous empêchent de reconnaître ces simples faits.
De plus, vous dites que vous voulez seulement la Vérité, et pourtant vous parlez comme un fanatique étroit et ignorant qui refuse de croire à autre chose que la religion dans laquelle il est né. Tout fanatisme est une fausseté parce qu’il contredit la nature même de Dieu et de la Vérité. La Vérité ne peut pas s’enfermer dans un seul livre, que ce soit la Bible, le Véda ou le Coran, ni dans une seule religion. L’Être Divin est éternel et universel et infini, et il ne peut être la seule propriété des seules religions musulmanes ou sémites et de ceux qui se trouvent descendre de la lignée biblique avec des prophètes juifs ou arabes comme fondateurs. Les hindous, les confucéens et les taoïstes, et tous les autres, ont autant le droit d’entrer en relation avec Dieu et de trouver la Vérité à leur manière. Toutes les religions contiennent quelque vérité, mais aucune n’a la vérité totale; toutes sont des créations du temps et finalement déclinent et périssent. Mahomet lui-même n’a jamais prétendu que le Coran fût le dernier message de Dieu et qu’il n’y en aurait pas d’autre. Dieu et la Vérité durent plus longtemps que ces religions et se manifestent nouvellement selon la forme et la manière que la Sagesse Divine choisit. Vous ne pouvez pas enfermer Dieu dans les limites de votre étroit cerveau ni dicter au Pouvoir Divin et à la Conscience Divine comment ils se manifesteront et où et par qui; vous ne pouvez pas dresser vos barrières de nain contre la Toute-Puissance divine. Là aussi, ce sont de simples vérités, que l’on est en train de reconnaître partout dans le monde; seules les esprits enfantins et ceux qui végètent dans les formules du passé peuvent le nier.
Vous avez insisté pour que je vous écrive et vous avez demandé la Vérité, et j’ai répondu. Mais si vous voulez être musulman, personne ne vous en empêche. Si la Vérité que j’apporte est trop grande pour que vous la compreniez ou la supportiez, vous êtes libre d’aller vivre dans la semi-vérité ou dans votre propre ignorance. Je ne suis pas ici pour convertir qui que ce soit; je ne prêche pas au monde pour qu’il vienne à moi et je n’appelle personne. Je suis ici pour établir la vie divine et la conscience divine en ceux qui, d’eux-mêmes, sentent l’appel pour venir à moi et qui restent fidèles à l’appel, et en personne d’autre. Je ne vous demande pas, ni Mère non plus, de nous accepter. Vous pouvez partir quand vous voulez et vivre la vie du monde ou une vie religieuse selon votre préférence. Mais puisque vous êtes libre, les autres aussi le sont de rester ici et de suivre leur propre chemin...»

23 octobre 1929
Sri Aurobindo
On Himself, XXVI.482

mercredi 25 avril 2012

TRANSFORMATION RADICALE DE CONSCIENCE ET CULTURE AUTHENTIQUE DE L'ÂME.



Extrait de la lettre d’Emile Zola, L'Aurore du 13 janvier 1898.

Quant aux gens que j'accuse, je ne les connais pas, je ne les ai jamais vus, je n'ai contre eux ni rancune ni haine. Ils ne sont pour moi que des entités, des esprits de malfaisance sociale. Et l'acte que j'accomplis ici n'est qu'un moyen révolutionnaire pour hâter l'explosion de la vérité et de la justice.
Je n'ai qu'une passion, celle de la lumière, au nom de l'humanité qui a tant souffert et qui a droit au bonheur. Ma protestation enflammée n'est que le cri de mon âme. Qu'on ose donc me traduire en cour d'assises et que l'enquête ait lieu au grand jour !




Transformation radicale de conscience

En cette période chaotique de fin d'humanité, où nous sommes les témoins impuissants de l'effondrement de tous les systèmes et de nos pays, qu'allons-nous faire ? Continuer à écouter les propositions désastreuses de nos dirigeants et sombrer avec eux, ou retrouver notre pouvoir véritable et l'exercer ? Nous avons le choix et le moment est venu de prendre une décision.

La plus grande crise évolutive de tous les temps est amorcée. Elle nous conduit tout droit à l'anéantissement de nos habitudes, nos désirs et nos croyances illusoires pour qu'émerge l'être véritable qui sommeille en nous. La seule autorité est à l'intérieur de l'individu conscient de son identité. C'est à une révolution de conscience que nous sommes invités. C'est un rendez-vous ! (dernières nouvelles sur personacratia)


Je trouve cette citation intéressante. En fait je suis d'accord avec le fait que nous devons être notre propre autorité et que donc "la seule autorité est à l'intérieure de l'individu". Mais reste à savoir de quelle identité nous sommes conscient. Tant que l'âme n'a pas émergée, il y a peu de chances que cette autorité intérieure soit fiable.

Personnellement, je ne trouve pas que Personocratia très convaincante sur ce dernier point. 

Dans le Guide Almora de la spiritualité, j'ai critiqué des points assez fantaisistes aux yeux de ceux qui utilisent leur raison sceptique et respecte la science et l'histoire (voir cet article qui contrevient à tout ce que la science et la raison critique nous apprennent). Mais après tout ceci requiert un savoir extérieur pointu et une relativisation sceptique demanderait beaucoup d'efforts. 

Je veux ici considérer un point spirituel touchant à la réalisation de l'âme à laquelle Personocratia se réfère en me plaçant au sein d'une perspective intégrale (côté Sri Aurobindo, Mère, Satprem). Et ce point de vue amplifiera ce qu'il y a de positif dans son approche le libérant de ce qui semble un peu l'engluer dans les demies-vérités (mais moi-même n'en suis-je pas encore là lorsque j'accepte d'être mis en lumière !?).

Prenons un exemple parmi des tas d'autres : Personocratia défend la théorie du centième singe. Cette théorie a le vent en poupe dans le New age voir dans le mouvement intégral mais elle n'est guère rigoureuse et défendable scientifiquement dans son idée de masse critique. Selon moi, elle l'est encore moins si l'on part d'une réalité psychique en arrière plan de toutes les formes vivantes et qui au fond évolue à travers l'évolution de ces formes. 

Le saut à une nouvelle espèce ne se fait que si des âmes en ont le besoin. Ce n'est pas alors une question de nombre ou de masse critique. Le travail isolé d'une seule grande âme peut réaliser un pont vers une nouvelle manière physique d'exister. Au niveau de l'évolution culturelle (qui n'est pas physique) nous en avons de nombreux exemples. Enfin l'évolution du vivant ne passe pas par la mutation graduel d'un grand groupe : il semble qu'une grande partie de notre espèce n'ait eu à un moment que quelques femmes à son origine voir une seule pour sa globalité



Sri Aurobindo dans La Vie divine écrit p.882 chapitre 23 dans la traduction de Mère :
Si une création supérieure est prévue, ce n'est certainement pas à partir de l'homme que le degré, le type ou le modèle nouveau pourra se développer, car, dans ce cas, il existerait une race, une espèce ou une catégorie d'êtres humains qui posséderait déjà les premiers éléments du surhomme, tout comme l'être animal particulier qui s'est transformé en homme possédait déjà, ou contenait en puissance, les éléments essentiels de la nature humaine. Or, il n'existe pas de race, de genre ou de type semblables; tout au plus existe-t-il certains êtres mentaux spiritualisés qui cherchent à s'échapper de la création terrestre. Si par une loi occulte de la Nature une telle transformation de l'être humain en un être supramental était prévue, elle ne pourrait être accomplie que par un petit nombre d'individus qui se détacheraient de l'espèce pour former le premier fondement de ce nouveau type d'êtres. Rien ne laisse supposer que l'espèce tout entière parviendrait à cette perfection ; cette possibilité ne pourrait s'étendre à toutes les créatures humaines.
Il se peut que Mère, Sri Aurobindo et Satprem à eux trois aient effectivement réussi à poser le pont occulte vers une nouvelle espèce pour les âmes qui en éprouveront le besoin et qui ayant fait le tour de l'espèce humaine y seront prêtes [Chacun d'entre eux décrit son avancée à partir de ce qu'a réalisé son prédécesseur et ce n'est pas leur seul point de vue, Kireet Joshi ou Niranjan Guha Roy en témoignent à leur façon.]. 

Toutefois ceci restant une question d'expériences et de réalisation que nous n'avons pas, revenons à une vision mentale où ceci ne reste qu'une possibilité. Restons-en au cas de celui qui peut entrevoir en lui les lumières psychiques :


C'est parce qu'il sera à partir de son développement psychique à l'unisson de la volonté de la nature qu'il accomplira complétement le tour du cycle humain car c'est le niveau de développement psychique qui implique le niveau de développement possible pour un être humain :


Du point de vue de l'âme, les différentes mentalités qu'ont pu repérer les développementalistes sociaux (Grave, Beck et Cowan ou encore Ken Wilber par exemple) permettent juste de trouver son expression la plus satisfaisante en fonction de sa capacité à entrer en harmonie au travers de l'individualité avec la volonté de la nature :
[Il] se révèle que l'effet fondamental du Mental dans l'homme n'a pas été de le rendre plus intelligent (intelligent par rapport à quoi ? la souris dans son trou a aussi la parfaite intelligence de son propre terrain) mais de l'individualiser au sein de sa propre espèce et de lui donner le pouvoir de varier [...] et finalement de le rendre capable de jeter un regard sur ce qui dépasse son propre état.
Car au fond les développementalistes sociaux se trompent s'ils voient là d'abord une forme de progrès dans l'évolution de la conscience.

Cliquez ici sur l'image pour la voir en détail



En effet comme l'écrit Sri Aurobindo un peu plus loin dans le même chapitre 23 p.883 dans La Vie divine :
[L]'idée même de progrès humain est très probablement une illusion, car rien n'indique qu'après avoir émergé du stade animal, l'homme, en tant que race, ait radicalement progressé au cours de son histoire. Tout au plus a-t-il avancé dans sa connaissance du monde physique, dans les sciences, dans ses rapports avec son milieu, dans son utilisation purement extérieure et utilitaire des lois secrètes de la Nature. Mais par ailleurs, il est resté ce qu'il a toujours été depuis l'aube de la civilisation ; il manifeste les mêmes capacités, les mêmes qualités, les mêmes défauts, il fait les mêmes efforts, commet les mêmes erreurs, parvient aux mêmes accomplissements, enregistre les mêmes échecs.
Si progrès, il y a eu, c'est un progrès à l'intérieur d'un cercle — un cercle qui va peut-être s'élargissant, mais rien de plus.
L'homme d'aujourd'hui n'est pas plus sage que les voyants, les sages et les penseurs d'autrefois ; il n'est pas plus spirituel que les grands chercheurs de jadis, les premiers et puissants mystiques ; il n'est pas supérieur, dans les arts et métiers, aux artistes et artisans de l'antiquité. Les vieilles races disparues firent preuve d'une originalité et d'une invention innées, d'une aptitude naturelle à faire face aux problèmes de la vie, et si l'homme moderne est allé un peu plus loin dans ce domaine, ce n'est pas parce qu'il a accompli un progrès essentiel, mais parce que ses capacités se sont développées, élargies, enrichies, et qu'il a hérité des accomplissements de ses prédécesseurs.  [...] Mais si son mental est capable de s'ouvrir à ce qui le dépasse, alors il n'y a aucune raison que l'homme lui-même ne puisse atteindre au supramental et à la surhumanité, ou, tout au moins, ne prête son mental, sa vie et son corps à l'évolution de ce terme plus grand de l'Esprit et à sa manifestation dans la Nature.
Par ailleurs sans mettre en cause ce qui vient d'être dit, on peut aussi considérer que cet élargissement a déplacé le centre problématique de l'humanité entière. C'est l'âme de tous qui dans l'expérience est obligée de s'affronter à des limites civilisationnelles sans cesse déplacées mais chaque fois non résolues.
Cliquer sur l'image pour agrandir.


Autrement dit, si des âmes doivent effectuer consciemment le passage du mental au supramental c'est-à-dire vers une conscience au-delà du mental humain, il nous faut susciter une culture permettant de nous individualiser psychiquement physiquement, vitalement, mentalement et spirituellement tout en élargissant notre conscience de plus en plus universellement (mentalement, vitalement et physiquement) pour mettre notre réalité psychique en harmonie avec la volonté de la nature.

Une solide et rigoureuse vision intégrale mentale et plus largement une culture intégrale comprenant aussi les plans émotionnels et corporels est donc nécessaire pour que le psychique prenne plus facilement (et moins douloureusement voire moins cruellement) conscience de soi et de la volonté de la nature en l'homme.

mardi 24 avril 2012

LA FEDERATION D'UN MOUVEMENT INTEGRAL AU SENS LARGE EST-ELLE POSSIBLE ?


En travaillant sur le Guide Almora de la spiritualité au sujet du mouvement intégral, il semble évident qu'il y a deux côtés à ce mouvement. Pour aller vite, il y a un côté Sri Aurobindo, Mère et un côté Ken Wilber et autres.

Une question légitime se pose alors à l'observateur attentif : ces deux côtés du mouvement intégral forment-ils un mouvement intégral au sens large ? 


Quels sont les points sur lesquels ces deux côtés sont unanimes ?

1 - le paradigme commun est l'évolution : évolution spirituelle, culturelle, sociale et matérielle (physique et biologique) qui ne forment qu'une seule et même évolution. Puisque tout évolue, on ne peut pas établir mentalement une vérité définitive. L'évolution est ce qui modifie précisément nos conceptions mentales même si mentalement on peut apprendre à en devenir conscient. Pour le mouvement intégral, l'évolution n'est pas seulement un fait scientifique mais une manière d'être. Elle est la réponse aux crises morales, sociales, économiques, financières, écologiques, etc. que nous affrontons car ce que nous traversons est d'abord une crise évolutive. Évoluer consciemment permettrait certainement d'amoindrir le caractère catastrophique de cette crise évolutive en cours mais globalement que nous voulions ou non nous participerons au saut évolutif en cours. En devenir conscient transforme cela en aventure stimulante et relativise les peurs suscitées par la situation de crise.

2 - l'esprit et la matière sont les deux faces d'une même réalité. Les spiritualités dans le passé se sont mises le plus souvent en dehors de la matière, en marge du monde, etc. Agir sur l'esprit dans le mouvement intégral au sens large implique l'ordre matériel et réciproquement agir matériellement met en jeu une transformation spirituelle. La spiritualité est utilisée entre autres moyens par le mouvement intégral en vue de participer de plus en plus consciemment à l'évolution en cours. L'éducation corporelle, émotionnelle et intellectuelle est aussi à ré-envisager dans cette perspective. Les organisations humaines qu'elles soient économiques ou politiques doivent être réinventées. Les productions et les activités qu'elles soient technologiques, artistiques, médicales, etc. s'en trouveront renouvelées. Etc.

Ces deux points me semblent former la base d'un mouvement intégral au sens large.

Où sont les écarts les plus problématiques entre les deux côtés ?

1- Le yoga de Sri Aurobindo met l'accent sur la transformation même du corps humain. Sa compagne, Mirra Alfassa, qu'il appelait plus souvent Mère, a développé ce qu'elle nomme un yoga des cellules dont il est rarement question dans l'approche de Wilber.
Mais on notera que Wilber évoque un supramental (supermind sur le schéma précédent), entend-il comme Sri Aurobindo que l'écart esprit-matière peut s'amoindrir ? L'intérieur et l'extérieur dans son quadrant peuvent-ils être approchés simultanément c'est-à-dire supra-mentalement ? En fait, le mental est en quelque sorte obligé à une approche extérieur et que les lumières reçues de l'intérieur sont toujours limitées même si elles permettent parfois de pressentir les réalités extérieures : le quadrant souligne bien ce point volontiers occulté par de nombreux spiritualistes y compris certains prétendus disciples de Sri Aurobindo qui dès lors se croient parvenus au supramental alors qu'ils ne cernent même pas les contours du mental.

Cet écart (s'il est réel) reste selon nous un écart en aval qui ne peut être considéré vraiment sérieusement que si on arrive à une maîtrise mentale, émotionnelle et pulsionnelle par la lumière intérieure. Ceci implique une disparition complète de l'ego rarement rencontrée.

2 - Les références à l'occultisme sont nombreuses parmi certains prétendus disciples de Sri Aurobindo et Mère. Les expériences occultes sont souvent confondues avec des ouvertures au supramental. De nombreuses personnes se réclamant de Sri Aurobindo et Mère s'attribuent des pouvoirs et discourent d'une façon assez irrationnelle. Le supramental devient un prétexte pour calomnier la rigueur mentale, la clarification émotionnelle, etc. On notera que Sri Aurobindo avait noté le danger pour les disciples qui découvraient ce continent de forces de consciences occultes : il parlait de zone intermédiaire dans la croissance spirituelle que seul un ancrage profond dans le psychique et ses qualités telles la sincérité de l'âme, permettait de traverser.

Cette réalisation de l'âme, de l'individuation divine, seule garantit une possible prise de cosncience de la force évolutive spirituelle et supramentale selon Sri Aurobindo et Mère. Cette réalisation est pour eux la clé d'un occultisme sûr.

Ici une certaine rigueur caractéristique de Ken Wilber et des principaux acteurs de ce versant du mouvement intégral sont les bienvenus. On peut penser l'occultisme sans perdre de vue authenticité et rigueur.

A travers les points 1 et 2, on voit combien l'approche de Ken Wilber peut être utile dans le discernement d'une fidélité à l'approche authentique de Sri Aurobindo. Et réciproquement ceux qui parmi les admirateurs de Wilber se méfient des systèmes pourront tracer davantage leur propre chemin grâce à la découverte approfondie de Sri Aurobindo.

3 - Le rôle et le statut de l'âme ou être psychique auxquels Sri Aurobindo, Mère et leurs disciples les plus remarquables donnent une place essentielle ne semblent pas soulignés par Wilber même si parmi ses proches Andrew Cohen, Steve MacIntosh ou Marc Gafni semblent s'y intéresser davantage.

Cet écart de sensibilité induit divers enjeux qui induiront dans un mouvement intégral au sens large des efforts de compréhension réciproques :
- le sens du développement individuel et collectif qui selon Sri Aurobindo et ses disciples doit être aussi et avant tout une psychisation ;
- les pratiques spirituelles et l'usage des techniques psychologiques qui selon Sri Aurobindo et ses disciples doivent donc être individualisées et individualisantes ;
- etc.

Par exemple, nous y reviendrons dans d'autres postes, ceci conduit à des nuances sur :

- le rapport au leadership (redéfinition du rôle d'un leader au service d'une communion consciente des âmes, reconsidération de la nature de toute forme d'enseignement qui ne doit pas entraver la psychisation de l'enseigné mais au contraire la servir, etc.) ;
- le rapport à la communication (comment communiquer sans tomber dans la propagande s'interroge Sri Aurobindo qui pense que seules les âmes prêtes doivent se réunir) ;
- le rapport à la technique (si la psychisation est une individuation, toute technique est minorée et par ailleurs la technologie s'avère en partie illusoire car c'est l'âme directement qui cherche à agir dans l'univers et l'action de l'ego mental avec un instrument technologique restera illusoire) ;
- le rapport à l'argent (l'argent doit être mis au service de l'évolution sans qu'il compromette la psychisation en suscitant une forme ou l'autre d'injustice, l'argent ne doit pas représenter le prix à payer pour évoluer,  l'argent doit définitivement ne plus servir de caution à une évolution centrée sur la lutte pour la vie dont la version socialisée est l'idée de "gagner sa vie") ;
- etc.

Globalement les deux points formant la base d'un mouvement intégral au sens large devraient permettre de solder au niveau de la pratique elle-même (et non des théories) les nuances les plus gênantes sur le 3 pour donner à ce mouvement une réalité collective.

(A suivre.)

dimanche 22 avril 2012

LE YOGA PAR NIRANJAN GUHA ROY.

Qu’est ce que le yoga ?

Niranjan Guha Roy – Sri Aurobindo Ashram 1977

Qu’est ce que le yoga ?

En Inde depuis les temps les plus reculés, il est dit qu’on a besoin de beaucoup, beaucoup d’années pour arriver à être en contact avec le Divin et qu’on doit faire une sadhana longue et difficile pour arriver même à une réalisation partielle. Quand nous lisons les vies des grands Saints de tous les pays, les adorateurs de Dieu on constate la même chose : il n’y a pas de route facile jusqu’au Ciel. L’effort le plus grand et le plus laborieux avec une patience et endurance illimitées est promis à ceux qui entreprennent la découverte du Divin. Nous voulons quelque chose qui changerait radicalement la vie humaine en vie divine. Cette vie de yoga est sérieuse et ce que nous demande le Divin est sans compromis. L’appel sur nous est un privilège rare, accordé aux âmes audacieuses et consacrées. Comment peut on être en paix tant qu’il y a l’ignorance, l’obscurité, la violence, la lutte, la haine, la passion, des maladies, l’absence d’amour, l’intolérance, la cruauté, tout ces millions de dragons, de démons et de forces diaboliques qui retiennent pratiquement l’humanité entière comme des esclaves, prisonniers et otages. Le pouvoir et la lumière libératrice sont là devant nous la main tendue pour nous aider et nous relever. Avec espoir, ardeur et amour nous devons lever les yeux vers le soleil doré et nous ouvrir, tous nos centres, toutes les cellules de notre corps à ses rayons transformateurs et divins. C’est la vraie régénération, la libération vraie.
La plante est un symbole visible de l’aspiration spirituelle, comme elle se dresse vers la lumière du soleil, comme elle dépend de la lumière pour son existence, comme elle lutte pour avoir un aperçu de la lumière du soleil ! Pour le sadhak du yoga intégral, il n’y a aucun repos, aucun lit de roses, aucun endroit confortable où il pourra se reposer longtemps. Nous avons un million de batailles à livrer et à gagner.
Il faut raffermir notre détermination et continuer d’avancer délivrés du poids des désirs et des attachements, enflammés par le feu de la conquête divine. Voici le rôle assigné aux disciples de la Mère et Sri Aurobindo.
Il faut aussi expliquer quelque chose de fondamental concernant le yoga. Il y a trop souvent des idées fausses à ce sujet. Le retour à la nature n’a rien à faire avec le yoga. La concentration sur l’alimentation, biologique ou autre a très peu à faire avec le yoga. Former une communauté ou vivre en groupe juste pour être ensemble n’a rien à voir avec le yoga. Yoga en Inde signifie union avec le Divin, l’Absolu et la discipline nécessaire pour arriver à la réalisation. Le but de quelque bonheur personnel, d’être heureux, d’aimer d’une manière humaine appartient à l’éthique et n’a rien à voir avec le yoga.
La Gîta est la synthèse de toutes les formes de yoga pratiqués en Inde. Le yoga de Sri Aurobindo commence là où la Gîta se termine. Être conscient du divin, de la réalité spirituelle, être conscient que tout est divin, que la terre et l’évolution sont une manifestation consciente du Divin, être conscient de l’Un et de sa volonté dans le monde, être mu par Lui, vivre en Lui, être possédé par Lui, être progressivement transformé en un être divin voici les marches de l’ascension vers la vie divine. Ceci est un sujet vaste et complexe. Plus que n’importe quelle connaissance intellectuelle contenue dans des milliers de livres, une seule vraie et profonde expérience, le toucher de la Grâce est beaucoup plus convaincante au chercheur de vérité.

Nous devons cultiver constamment l’humilité, l’offrande de soi au Divin. Une soumission joyeuse à la guidance du Divin, une fois que nous L’avons vu et reconnu, est le chemin le plus sur pour le chercheur. Seule l’âme préparée pendant de nombreuses vies peut prendre ce chemin de dépendance au Divin, de soumission à sa volonté, amour et sagesse avec joie et enthousiasme. Mais nous pouvons tous nous préparer afin d’être prêts pour ce moment de grâce que la soumission apporte, la Présence de l’Eternel, sa possession de notre être, vie et action.
 

EVOLUTION DES MENTALITES ET DES MOUVEMENTS POLITIQUES EN FRANCE.

 La pensée intégrale suggère le schéma ci-dessus pour comprendre les diverses mentalités et expliquer comment elles se supposent les unes les autres.

A partir de là on peut considérer aussi la position de diverses formations politiques en fonction de leur plus ou moins grand égoïsme communautaire mais aussi de leur plus ou moins grande sensibilité à un environnement plus large qui conditionne son devenir. Celui qui réalise en lui la présence de Cela qui commande toute manifestation ainsi que toute évolution de la manière dont Cela se manifeste voit à l’œuvre la venue d'une conscience collective évoluant de plus en plus consciemment.
Ainsi on notera la proximité des salafistes musulmans qui rejette la société française jugée mécréante et des FN malgré leur antagonisme apparent évident : les deux mouvements sont tentés par le prémodernisme c'est-à-dire par le dogmatisme, l'autoritarisme et l'ethnocentrisme communautariste. L'UMP serait en mesure d'intégrer quelque chose du conservatisme ethnocentrique français et du conservatisme religieux musulman tout en les amenant à se dépasser et à se réconcilier dans un niveau de mentalités plus élevé même si dans les élections en cours cela a été sans aucun doute manqué : il aurait fallu envoyer des messages précis en faveur de figures d'un islam sans compromis avec le salafisme tout en s'attaquant à l'idée que l'islam est forcément inintégrable à la république. Et pour vraiment mener une opération d'inclusion et de transcendance jusqu'au bout il faudrait montrer la proximité des dangers sociaux des fascinations du FN avec ceux du salafisme. Car l'humanité doit se défaire dans son évolution de toute étroitesse mentale : elles ont des caractères semblables même si elles semblent se condamner les unes les autres. Il y a le refus du risque de la rencontre et du dialogue, il y a la crainte de s'aventurer dans d'autres manières culturelles de penser et de ressentir. Où sont les politiques de droite qui s'en prendront à l'ethnocentrisme au nom d'une nation républicaine au-delà de toute réalité ethnique donnée ? Le Brésil, le Canada ou les Etats-Unis sont de grandes nations qui se sont bâties au-delà de toute ethnie qui les ont constitués à un moment ou un autre sans qu'on puisse nier une continuité culturelle.
On peut souhaiter que cette fusion intégration s'opère pour apaiser la société française dont on ne peut plus affecter de nier la composante musulmane. L'identité française a certainement besoin de se réinventer non pas contre l'islam mais avec un islam national qui reconnaît pour lui l'importance de la République française et donc une République qui agit en vue de le favoriser.

Par ailleurs on remarquera que la tentative de synthèse du centre entre gauche et droite ne peut pas réellement se produire au niveau où elle est envisagée. Si un mouvement sociocratique intégral est l'horizon de notre évolution mentale et politique alors le centre disparaîtra comme une esquisse de cette future synthèse encore absente des organigrammes politiques.

On notera que dans le champ politique n'est pas encore apparu un mouvement sociocratique intégral. Un tel mouvement proposerait une organisation démocratique non plus centrée sur le vote majoritaire ou sur la recherche d'un consensus par compromis mais sur l'innovation raisonnée et le consentement et la prise en compte d'une évolution des mentalités et de la dimension éminemment spirituelle qui l'anime. La communication sans violence et la recherche du consensus minimal éprouvé du désir d'être citoyens ensembles ainsi que la sociocratie sont proposés aujourd'hui activement par le mouvement colibris dont la figure emblématique est Pierre Rabbhi. Ce mouvement où un pluralisme spirituel libéré du religieux est reconnu pose sans aucun doute les bases d'une future sociocratie intégrale capable aussi d'intégrer consciemment le fait de la différence des mentalités et de leur évolution.

 Les partis de gauche ont sans aucun doute une énorme difficulté à composer entre leur composante moderne nationale et mondiale d'extrême gauche et leur composante plutôt humaniste et systémique européenne et écologiste. Le mouvement Colibris pourrait représenter pour la gauche le dépassement et la fusion de ce qui forme en elle encore un antagonisme. Mais lui-même pour intégrer ce qu'il y a de légitime dans les mentalités qui politiquement s'identifient à droite aura besoin d'être intégré dans un mouvement sociocratique intégral d'envergure qui reste encore à créer. Toutefois son niveau de mentalité déjà profondément systémique et sensible à la spiritualité peut le conduire à évoluer en ce sens sans qu'il soit besoin d'un nouveau mouvement : ce mouvement a déjà intégré une gouvernance sociocratique et la nécessité d'un pluralisme spirituel non dogmatique.

Un tel mouvement politique qui prendrait au sérieux l'évolution des mentalités et leur intégration n'incarnera cependant pas forcément encore la spiritualité intégrale. Niranjan Guha Roy précise ce qu'est l'idéal le plus élevé dans une approche de spiritualité intégrale :

« Il faut aussi expliquer quelque chose de fondamental concernant le yoga. Il y a trop souvent des idées fausses à ce sujet. Le retour à la nature n’a rien à faire avec le yoga. La concentration sur l’alimentation, biologique ou autre a très peu à faire avec le yoga. Former une communauté ou vivre en groupe juste pour être ensemble n’a rien à voir avec le yoga. Yoga en Inde signifie union avec le Divin, l’Absolu et la discipline nécessaire pour arriver à la réalisation. Le but de quelque bonheur personnel, d’être heureux, d’aimer d’une manière humaine appartient à l’éthique et n’a rien à voir avec le yoga. »

Nous sommes loin ici de ce que mettent au centre tant les mouvements écologiques que les mouvements comme le mouvement colibris. Si vraiment nous sommes au cœur d'une crise évolutive mettant en jeu une évolution spirituelle de la conscience, l'évolution des mentalités qui permettra vraiment d'y faire face ne pourra être qu'une valorisation collective et donc politique de la recherche spirituelle. Mais contrairement aux formulations religieuses et politiques qui sont toujours systématiques et dogmatiques, la spiritualité en jeu ne saurait l'être. Comme l'écrit Sri Aurobindo :

« La vie échappe aux formules et aux systèmes que notre raison s'efforce de lui imposer ; elle s'avère trop complexe, trop pleine de potentialités infinies pour se laisser tyranniser par l'intellect arbitraire de l'homme... Toute la difficulté vient de ce qu'à la base de notre vie et de notre existence, il y a quelque chose que l'intellect ne pourra jamais soumettre à son contrôle : l'Absolu, l'infini. »

Au-delà de toute institution humaine qui relève forcément du mental et de ses formulations intellectuelles, il faudrait considérer la possibilité d'une vie collective animée par des âmes ayant vaincu tout égocentrisme. Elle ne s'inscrirait plus dès lors dans aucune institution mais dans une une reconnaissance immédiate de la volonté évolutive de la nature (que Sri Aurobindo appelle la Mère).

Sri Aurobindo écrit dans Le Cycle Humain :

« Un anarchisme spirituel ou spiritualisé pourrait sembler plus proche de la vraie solution, ou du moins la pressentir de loin.[...] si l'on tient compte de l'impuissance d'aucun "isme" à exprimer la vérité de l'Esprit qui dépasse tous ces compartimentages [...]La solution ne se trouve pas dans la raison, mais dans l'âme de l'homme, dans ses tendances spirituelles. Seule une liberté spirituelle et intérieure peut créer un ordre humain parfait. Seule une illumination spirituelle plus haute que les lumières rationnelles peut éclairer la nature vitale de l'homme et imposer l'harmonie à ses recherches égoïstes, à ses antagonismes et ses discordes.»

N.B : On pourra davantage envisager les enjeux politiques français d'un point de vue intégral en consultant un article de Olivier Breteau dans son Journal intégral sur La transition culturelle.

dimanche 1 avril 2012

EVOLUTION DE L'HOMME. RECENTES DECOUVERTES.

Cette représentation de notre évolution suggère qu'elle est encore en cours mais elle semble assez linéaire et directionaliste. Si l'aventure de l'évolution consciente a une dimension individuelle, on ne la voit pas vraiment.

Le schéma simplifié suivant relativise beaucoup notre positionnement au bout de la chaîne et suggère que plusieurs embranchements sont possibles après notre espèce :



Je reproduis ci-dessous un article du sites Hominidés.com qui montre une des simplifications en aval : la présentation de notre lignée évolutive sous forme d'arbre trace des fils évolutifs séparés alors qu'il s'agit plutôt de vagues qui en déferlant s'entrecroisent, se transformant ainsi puis de nouveau des vagues se séparent les unes des autres ayant leur propre transformation avant de s'entrecroiser de nouveau, etc.

http://www.hominides.com/html/actualites/homme-denisova-adn-neandertal-0378.php


L'Homme de Denisova et Néandertal,
un ancêtre commun ?



Des métissages entre plusieurs espèces d'hominidés...  


Photo : David Reich et al., Nature
Dent de l'homme de DenisovaEn mars 2010 des chercheurs de l'Institut Max Planck (Anthropologie Evolutionniste, Leipzig, Allemagne) avait découvert une nouvelle espèce d'hominidé en étudiant uniquement l'ADN contenu dans l'os d’une phalange. Cette étude avait permis de différencier cet ADN qui n'appartenait ni à un néandertalien, ni à un Homo sapiens. Cet hominidé nouveau avait été nommé Homme de Denisova en référence à la grotte de Denisova (sud de la Sibérie). Une nouvelle équipe Les résultats sont publiés dans la revue Nature du 23 décembre 2010 par une équipe internationale de scientifiques dont quelques uns qui avaient déjà participé à la première publication : Svante Paabo (Institut Max Planck) et Richard Green (Université de Californie), entre autres.


Dent de l'homme de Denisova vue du dessus
Les études de l'os et d'une dent continuent...


Les éléments fossilisés de l'homme de Denisova (une phalange et une dent) montrent des différences morphologiques notoires avec ceux de l'homme de Neandertal et d'Homo sapiens. En particulier, la dent, découverte dans la même grotte que celle de l'os de doigt, ressemble beaucoup plus à celles d'hominidés plus vieux comme Homo habilis et Homo erectus. L'étude de l'ADN montre que les 2 éléments appartiennent à la même espèce, mais pas au même individu.


L'homme de Denisova, un frère de l'Homme de Néandertal ?


Le projet de séquençage du génome de l'homme de Denisova a permis de nouvelles découvertes surprenantes. En comparant le séquencage du génome de l'homme de Denisova avec les génomes des Néandertaliens et des hommes modernes, les chercheurs ont déterminé que l'homme de Denisova appartenait à un groupe frère de l'homme de Neandertal... Ce qui signifie que Néandertaliens et Denisoviens descendent d'une même population ancestrale qui s'était elle même séparé plus tôt des ancêtres des hommes actuels.


Denisova et les Mélanésiens


L'étude a également trouvé des similitudes de séquences ADN entre les Dénisoviens et certains Mélanésiens actuels (entre 4 et 6%), ce qui suggère qu'il y a eu métissage entre Dénisoviens et les ancêtres des Mélanésiens. Cela veut également dire que le territoire de l'Homme de Denisova devait aller de la Sibérie au sud de l'Asie. Pour les chercheurs cette grande amplitude territoriale aurait du permettre de trouver un grand nombres de fossiles de cette population. Comme il n'en est rien les chercheurs suggèrent d'examiner plus attentivement les fossiles déjà trouvés dans cette région. Il est possible que des fossiles aient été mal "affectés".
« Il se pourrait que d'autres échantillons soient classés à tort, indique Richard Green. Mais maintenant, avec l'analyse de l'ADN, on peut dire de façon définitive à quelle espèce appartient un fossile ... c'est juste une nouvelle façon d'extraire des informations à partir de restes fossiles. »

Une nouvelle hypothèse de la sortie d'Afrique ?

A la lumière de cette nouvelle découverte il est possible d'imaginer un autre type de migration hors d'Afrique. Il y a 300 000 - 400 000 ans un groupe d'hominidés ancestraux aurait quitté l'Afrique. Il aurait divergé assez rapidement en deux populations. L'une va devenir l'Homme de Neandertal et va conquérir l'Europe à l'ouest, l'autre va coloniser les terres de l'est et devenir l'Homme de Denisova.Par la suite ( entre -70 000 et - 80 000 ans), Homo sapiens sort à son tour d'Afrique. Il va d'abord rencontrer les néandertaliens avant de conquérir l’Europe (voir la précédente étude montrant le métissage entre Sapiens et Neandertal) puis en se développant vers l'est il va également se métisser avec l'homme de Denisova... 


Richard Green déclare : 
"L'histoire est maintenant un peu plus compliquée. Au lieu de l'histoire, que nous pensions simple, d'une migration hors d'Afrique (Out of Africa) de homme moderne et le remplacement des Néandertaliens, nous voyons maintenant plusieurs axes de migrations avec plus d'espèces et des métissages plus nombreux qu'auparavant."
Sources : 

L'ÂME SELON SRI AUROBINDO.

Cet extrait de Sri Aurobindo prolonge le message précédent qui offre une approche plus phénoménologique d'une exploration du champ de conscience pour découvrir en soi un processus de psychisation, une dynamique d'influence de ce qu'on peut nommer notre âme et qui n'est pas à confondre avec notre ego et sa substance désirante plus ou moins inconsciente. Lisons cet extrait de Sri Aurobindo :
L'âme est décrite comme une étincelle du Feu divin dans la vie et la matière, c'est une image. Elle n'a pas été décrite comme une étincelle de conscience.

Il y a une conscience mentale, vitale, physique – différente du psychique. L'être psychique et la conscience ne sont pas la même chose.


Quand l'âme ou "étincelle du Feu divin" commence à élaborer une individualité psychique, cette individualité psychique est appelée l'être psychique.

L'âme ou étincelle est là avant que ne se développent un vital et un mental organisés. L'âme est quelque chose du Divin qui descend dans l'évolution en tant que Principe divin, afin de soutenir en elle l'évolution de l'individu sortant de l'Ignorance pour entrer dans la Lumière. Elle élabore, au cours de l'évolution, un individu psychique ou individualité d'âme qui croît de vie en vie, utilisant le mental, le vital et le corps en évolution comme ses instruments. C'est l'âme qui est immortelle, alors que le reste se désintègre; elle passe de vie en vie, transportant l'essence de son expérience et la continuité de l'évolution de l'individu.

C'est toute la conscience – mentale, vitale et aussi physique – qui doit s'élever et rejoindre la conscience supérieure et, une fois que la jonction est faite, la conscience supérieure doit descendre en eux. Le psychique est derrière tout cela et le soutient.

Il faut faire une distinction entre l'âme dans son essence et l'être psychique. À l'arrière-plan, chacun a une âme qui est l'étincelle du Divin – nul ne pourrait exister sans elle. Mais il est tout à fait possible qu'un être vital et physique existe sans avoir, derrière lui, un être psychique clairement évolué. Et pourtant on ne peut pas affirmer d'une manière générale que les hommes primitifs n'ont pas d'âme ou que leur âme ne se montre nulle part.

L'être intérieur se compose du mental intérieur, du vital intérieur, du physique intérieur – mais ce n'est pas l'être psychique. Le psychique est l'être le plus intérieur, tout à fait distinct de ceux-là. En réalité, le mot psychique est utilisé en anglais pour qualifier tout ce qui est différent ou plus profond que le mental, la vie et le corps extérieurs, tout ce qui est occulte ou supraphysique; mais cet usage est une source de confusion et d'erreur et nous l'écartons entièrement lorsque nous parlons ou écrivons au sujet du yoga. Dans le langage ordinaire, nous pouvons parfois utiliser le mot "psychique" au sens large et courant; ou en poésie, où la précision intellectuelle n'est pas de rigueur, nous pouvons quelquefois parler de l'âme au sens ordinaire et plus extérieur, ou dans le sens d'une vraie psyché.

L'être psychique est voilé par les mouvements de surface et s'exprime de son mieux à travers les instruments extérieurs qui sont régis davantage par les forces extérieures que par les influences intérieures du psychique. Mais cela ne signifie pas qu'ils soient entièrement coupés de l'âme. L'âme est dans le corps de la même manière que le mental ou le vital ; mais le corps qu'elle habite n'est pas seulement ce corps physique grossier, c'est aussi le corps subtil. Quand l'enveloppe grossière tombe, les enveloppes vitale et mentale du corps subsistent en tant que véhicules de l'âme jusqu'à ce qu'elles aussi se dissolvent.

L'âme d'une plante ou d'un animal n'est pas complètement latente: simplement, ses moyens d'expression sont moins développés que ceux d'un être humain. Il y a beaucoup de psychique dans une plante, beaucoup de psychique dans l'animal. Dans la forme de la plante, seul le vital-physique est évolué, donc elle ne peut pas s'exprimer; l'animal a un mental vital et le peut, mais sa conscience est limitée et ses expériences sont limitées, aussi la conscience et l'expérience de l'essence psychique sont-elles moins développées que dans l'homme ou du moins que ce n'est possible dans l'homme. Tout de même, les animaux ont une âme et répondent très volontiers au psychique en l'homme.

Le fantôme n'est évidemment pas l'âme. C'est soit l'homme apparaissant dans son corps vital, soit un fragment de son vital dont s'empare une force ou un être vital. La partie vitale en nous persiste normalement pendant quelque temps après la dissolution du corps et passe dans le plan vital où elle demeure jusqu'à ce que l'enveloppe vitale se dissolve. Ensuite elle passe, si elle est mentalement évoluée, dans l'enveloppe mentale vers un monde mental et, finalement, le psychique quitte aussi son enveloppe mentale et va à son lieu de repos. Si le mental est fortement développé, la partie mentale en nous peut rester et il en est de même du vital, à condition qu'ils soient organisés par l'être psychique véritable et groupés autour de lui – car ils partagent alors l'immortalité du psychique. Autrement, le psychique attire en lui le mental et la vie et entre dans une quiétude internatale.
Sri Aurobindo, Lettres sur le yoga, volume 1, deuxième partie, plans et parties de l'être.