œuvre de Niranjan et Amita Guha Roy |
Au sujet de la paix
La chose la plus recherchée dans le monde et en même temps la plus rejetée par les hommes est la paix. Quand elle est là, les hommes et les femmes s’ennuient. Quand elle est absente ils se plaignent. Mais la paix est toujours là, comme l’air que nous respirons. Elle est toujours accessible et peut devenir permanente dans notre conscience, dans notre être. Elle est la présence du Divin, de l’Esprit, un aspect tangible du Créateur suprême. Elle est accessible, présente dans le corps, dans le domaine vital de la vie, dans le mental et dans l’âme. Les arbres et les plantes, les pierres, la mer ou la matière juste vitalisée émanent une grande paix. C’est pourquoi ceux qui recherchent la paix se retirent souvent dans des endroits déserts. Les explorateurs qui ont été au pôle nord, ou au sommets des montagnes, les marins perdus dans l’immensité de l’océan, les voyageurs se reposant la nuit dans les déserts, même les cosmonautes loin de ce monde, sans pour autant être des êtres spirituels, ont souvent senti une grande paix, une paix vivante qui les pénètre et leur apporte un bonheur ineffable. On peut trouver une paix vivante dans la foret, spécialement dans des arbres géants, on peut sentir la paix dans leur sève même.
C’est avec l’éveil progressif de la vie que commence le tourment. L’éveil de la vie est en même temps celui du désir, du feu qui peut être apaiser juste pour un moment. Avec les animaux les plus évolués nous voyons une alternance entre paix et perturbation. Un lion qui chasse n’est pas paisible, un tigre qui se bat pour une femelle est la violence incarnée. Un lion bien repu est une image de paix. Les animaux ont la capacité naturelle d’être vraiment paisibles quand leur besoins primordiaux sont satisfaits. Même les hommes des tribus primitives ont une entrée dans une profonde paix. Chez eux, le mental, le tyran suprême, le tourmenteur est à peine né encore.
La réelle torture de l’homme commence avec l’éveil de l’être mental quand il mangea “la pomme de la connaissance”.
Avec l’éveil des idées de ce qui est bien ou mal, vrai ou pas vrai, de ce qu’il doit avoir, de ses droits, ses besoins et demandes, ses caprices, ces espoirs et aspirations, il est exilé du paradis. La paix est partie. La vraie raison ? Il est victime de ses propres pensées, de sa propre vision du monde. Il est lui même le lieu d’une immense contradiction incessante et à chaque pas, il est en contradiction avec le monde qui l’entoure. Sa recherche de la paix a commencé il y a bien des âges.
Les sages nous ont révélé comment l’obtenir. Le Bouddha nous a montré que pas l’abolition des désirs, on peut arriver à une paix absolue. Bien avant lui, il y a eu des sages qui recommandaient la pratique du détachement. Nous devons essayer de percevoir les choses à travers le témoin qui existe réellement en nous. Pour beaucoup de choses nous sommes vraiment des témoins mais pour ce qui nous touche personnellement, il est difficile d’être paisible, un témoin inébranlable. C’est le premier pas. On doit pratiquer la discipline de devenir un témoin. C’est la clé de la spiritualité indienne.
Puis graduellement, on découvrira que le témoin a le pouvoir d’apaiser, de calmer même les plus violents assauts des impulsions vitales et peut même apaiser les souffrances physiques. Le témoin peut calmer le mental assez facilement. C’est pourquoi les intellectuels désintéressés sentent une paix en eux. Mais il y a des degrés, des intensités, même des différentes substances de la paix. En résumé. L’abolition des désirs, au moins un contrôle lumineux des désirs, un détachement progressif et la découverte du témoin en nous sont des moyens à notre disposition.
Mais il y a un autre moyen tout puissant, souverain, infaillible qui est la prière.
Si nous pouvons nous abandonner dans les mains du Seigneur, de la Mère Divine, du Créateur divin, du Mystère de cette invisible Personnalité dans un mouvement d’humilité, de supplication, avec quelques mots spontanés d’un enfant "Aide moi, soutien moi, protège moi, donne moi la paix" alors le miracle se fait. Le grand mystère ne refuse jamais ses bénédictions et amour même à l’être le plus faible, misérable, déshérité du monde. Il nous enveloppe de sa paix qui est un bonheur indescriptible. Prier comme un enfant, ouvrir son cœur, exprimer ses tourments, souffrances, simplement, s’approcher de lui avec la confiance du chien fidèle. Alors il prend soin de son enfant qui ne se sentira plus jamais seul. La paix sera avec lui. La paix lui apportera une grande compréhension. La paix contient la lumière en elle. Dans la paix on comprend infiniment mieux. La paix apporte un repos bénéfique. En même temps, la paix nous libérera de ce que la spiritualité indienne appelle le recul, la peur, la honte, la haine, etc. Elle abolira intérieurement, psychologiquement le sens de séparation des autres. Nous sentirons profondément à l’intérieur de nous une unité avec tous les êtres, toute la création, comme si tout devient soi-même, tout est une paix infinie.
Si nous devenons plus vaste, si nous pouvons prier pour la paix, pour toute la terre, si nous pouvons être impersonnels, nous serons capables de sentir la paix partout, dans chaque chose, la seule réalité, la base de l’existence.
Que la paix apaise les désirs aveugles et la violence et soulage les souffrances. Paix pour chacun et pour toute la terre. Dans cette paix nous pouvons sentir l’Être suprême, le bonheur durable au dessus de tout conflit et contradiction. La paix immuable.
******
Niranjan Guha Roy 1977
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire